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11/12/2008

_Where no man has gone before : Women and science fiction_

Where no man has gone before : Women and science fiction: Lucie ARMITT (éditirice) : Routledge : 1991 : ISBN 0-415-04448-0 : 234 pages (y compris index + bibliographie) : une dizaine d'euros en occase pour un TP.

Where no man has gone before.jpg

Ce livre est un recueil de 13 essais (inédits lors de la parution du livres, puis parfois repris pour certains, IIRC) explorant les rapports entre la SF (ou la fantasy) et les femmes, à la fois quand elles sont actrices (auteures), sources de réflexion ou sujets (personnages).

Il est divisé en trois grandes parties :

- Quatre essais sur des auteures traitées individuellement, à savoir Haldane (pour Man's world), Burdekin (pour son étonnante dystopie nazie écrite en 1931 : Swastika night), C. L. Moore, Le Guin & Lessing (les deux dernières étant des passages obligées pour ce type d'ouvrage à orientation féministe).

- Cinq essais sur l'image de la femme dans la SF, tant écrite que cinématographique (deux essais dont un sur Starman et Blade runner qui est assez féroce dans sa critique plutôt pertinente d'un film culte qui peut se lire comme éminemment patriarcal).

- Quatre essais qui analysent le genre et/ou ses lecteurs (juveniles, fantasy Arthurienne...).

Swastika night (L&W 1985).jpg

 
Les diverses contributrices (100% féminines) sont les "usual suspects" de ce type d'exercice (l'essai) pratiqué dans ce contexte idéologique (une approche féministe) : Tuttle, Lefanu, Jones, Saxton.

Que dire de cet ouvrage ?

Tout d'abord, il s'inscrit dans une lignée importante d'ouvrages du même type, visant (pour les pires) à annexer la SF comme auxilliaire d'un féminisme militant ou à la dénoncer comme outil d'oppression à la solde du patriarcat ou (pour les meilleurs) à montrer que le genre SF est/a été un espace d'expression pertinent pour faire avancer les choses ou pour mener une réflexion sur les rapports entre les sexes.

Ce livre emprunte une voie médiane, en ce sens qu'il ne peut s'empêcher de reprendre pour partie des arguments et un vocabulaire devenus caricaturaux (les éternelles théories sur homme=soleil=bien, femme=lune=mal) ou de sombrer dans les lieux communs sur la SF. Clichés dont la partielle fausseté (les fameuses femmes écrivains forcées de prendre des pseudos féminins pour cacher leur sexe) a été démontrée dans des ouvrages sérieux. Pour rester bien dans la ligne, nous avons droit aux traditionnels et inévitables couplets laudatifs sur Le Guin, Russ ou Bradley (qui joue parfois dans les deux camps) et aux railleries non moins obligées sur les 'traîtresses à la cause" comme McCaffrey.

Une fois ces tics (surtout agaçants par leur prévisibilité) mis de côté, cet ouvrage offre malgré tout un certain nombre de discussions solides :
l'étude de Gamble sur C. L. Moore et les symboliques sexuelles est bien faite et convaincante;  le décryptage des stéréotypes féminins dans Blade runner ou dans Rite of passageest exécuté avec calme et précision, ce qui rend la démonstration assez percutante; le texte de Jones sur les juvéniles est intéressant et la démonstration par Moody de la logique de l'usage d'un cadre "Arthurien" pour des textes à visées féministes est parfaitement claire.

Rite de passage (OPTA 1973).jpg

Dans ce cadre, le texte final de Saxton est une note dissonante et une faute de goût, puisque l'ouvrage se termine par une diatribe de cet auteure qui dit en gros que l'on a mis ses textes dans la SF à tort (la fameuse "défense Atwood" avant l'heure) et que maintenant elle a décidé de se libérer de ce carcan et de quitter ce genre de médiocres. Elle va donc se mettre enfin à écrire la littérature (avec un grand L) qu'elle veut (mais sous un pseudo, comme quoi les réalités du marché s'imposent même aux idéalistes). Cette position courageuse et intègre honore sûrement son auteure mais ressemble fort à un crachat final dans une soupe (généralement) défendue par ses collègues et pourrait être perçue comme un manque de respect pour le cochon (machiste ou autre) de payant.

En conclusion, il s'agit d'un livre qui présente de bons passages, mais reste handicapé par son hétérogénéité marquée (normale pour un recueil d'essais de différentes mains) et un certain manque d'originalité (pour qui pratique ce genre d'ouvrage).

Note GHOR : entre 1 et 2 étoiles suivant la familiarité du lecteur avec le discours féministe sur la SF

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