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20/04/2016

_Judith Merril : A Critical Study_

Judith Merril : A Critical Study : Dianne NEWELL & Victoria LAMONT : 2012 : McFarland : ISBN-13 978-0-7864-4836-4 (la fiche ISFDB du titre) : xvi+239 pages (y compris index et bibliographies) : coûtait 40 USD pour un tp légèrement illustré en n&b, existe aussi en ebook (978-0-7864-8985-5).

merril,anglais,2 étoiles

Il est clair qu'il existe plusieurs visions de la place de Judith Merril dans l'histoire et l'évolution de la science-fiction. A cause de ses nombreuses casquettes (Futurian(e), écrivain solo ou en collaboration, anthologiste, critique, etc.) et sa grande implication dans certains cercles influents, elle a longtemps un peu "fait partie du paysage" et eu une voix qui comptait. Pour autant, son influence réelle reste l'objet de plusieurs perceptions divergentes. Certains, au vu de sa faible production de fiction (quelques romans y compris des collaborations et une trentaine de nouvelles) et de son départ au Canada, la voient comme une figure marginale, plus importante de  par ce qu'elle annonce (l'arrivée du féminisme au sein du genre) que par ses activités. D'autres, se basant sur ses activités d'anthologiste et son influence sur la scène de la SF canadienne, voudraient lui voir reconnaître une plus grande place dans l'histoire de la science-fiction. Cet ouvrage s'inscrit clairement dans cette dernière démarche.

merril,anglais,2 étoiles

Partiellement basé sur des articles parus précédemment dans diverses revues sur le genre (SFS ou Foundation), cet ouvrage est principalement divisé en deux parties distinctes. La première se concentre sur la fiction de Merril (écrite seule) et l'analyse en détail sous l'angle des thèmes récurrents (la frontière, la peur atomique, la communication ou la psychologie). La deuxième partie se compose de trois chapitres et, hormis le premier consacré aux collaborations, commence au moment où Merril arrête d'écrire (le tout début des années 60). New Waves and New Communities (chapitre 7) évoque les activités d'anthologiste de Merril et sa vie au Canada, The Memoir (chapitre 8 et dernier) est essentiellement une défense de son autobiographie (Better to Have Loved) écrite en collaboration avec sa petite fille, un titre évoqué ici-même. Une bibliographie primaire et secondaire ainsi qu'un index clôturent un ouvrage qui est agrémenté d'une dizaine de photographies n&b.

merril,anglais,2 étoiles

La partie consacrée aux écrits de Merril (et à ses collaborations, en particulier avec C. M. Kornbluth) est particulièrement intéressante même si on peut penser qu'il arrive aux auteurs de se forcer un peu pour trouver des choses à dire sur des textes véritablement mineurs parus dans des revues de troisième niveau (comme Future ou Space Science Fiction). Le choix d'un traitement thématique amène d'ailleurs à une lecture un peu complexe et non dépourvue de redites quand des textes comme Rain Check sont traités séparément dans plusieurs sections (ici celle sur le féminisme et celle sur les extraterrestres). C'est en tout cas un ensemble assez fouillé qui, de fait, balaye presque toute la (faible) production de l'auteur et met en lumière des écrits un peu moins connus que That Only a Mother ou (pour le monde anglo-saxon) Shadow on the Hearth.

merril,anglais,2 étoiles

Parmi les points qui m'ont gêné, j'ai, pour ma part, une appréciation très différente de celle de Newell et Lamont en ce qui concerne l'autobiographie de Merril (pour mémoire) et je maintiens mes réserves sur cet ouvrage. La défense présentée me paraît particulièrement embrouillée et rejetant trop facilement la faute sur les lecteurs (qui n'ont tout simplement pas compris l'originalité de la démarche de Merril). Chacun pourra juger sur pièce en la lisant. Plus important est que la thèse qui sous-tend l'ouvrage (à savoir que 1) l’importance de Merril dans l'histoire de la SF est délibérément sous-évaluée et 2) ceci à cause d'une sorte de complot aux protagonistes assez flous) est à mon avis fausse et insuffisamment étayée. En ce qui me concerne, j'ai du mal à créditer Merril d'une grande influence sur le genre pour plusieurs raisons : 1) sa période "écrivain" est assez courte (une petite dizaine d'années) et ne comporte pas vraiment d’œuvres considérée comme marquantes (si ce n'est encore une fois That Only a Mother dont les interprétations sociétales sont à mon avis postérieures à un texte qui est plus proche de l'horreur à chute que du proto-féminisme); 2) sa période "anthologiste" ne concerne presque exclusivement que des anthologies de reprises. Merril n'a donc pas pu exercer la même influence qu'un rédacteur en chef ou qu'un anthologiste qui suscite l'écriture de textes suivant un projet précis (comme a pu le faire Ellison); 3) sa période "femme d'influence" n'a pu s'exercer que sur un sous-ensemble réduit du champ de la SF (ici la SF canadienne contestataire de langue anglaise) ou par des écrits assez éphémères (sa rubrique Books dans F&SF qui n'a duré que 4 ans). Il est d'ailleurs assez frappant de voir que la Merril anthologiste (celle qui pourtant est censée avoir eu la plus grande influence sur le genre) est la grande absente de l'ouvrage. En gros, je pense qu'il n'est pas nécessaire d'inventer un complot qui aurait délibérément minoré la place de Merril, mais que objectivement, celle-ci, par son parcours (où elle s'est quand même mise sur la touche en partant au Canada), ne fait tout simplement pas partie des "prime-movers" du genre (on remarquera que, par exemple, Sabella la "classe" en No 67 de Who Shaped Science Fiction?). Malgré cela, tout l'intérêt de cet ouvrage militant mais solidement recherché est justement de forcer le lecteur à revoir son histoire de genre et éventuellement à en amender sa perception.

merril,anglais,2 étoiles

Note GHOR : 2 étoiles

15/03/2010

_Better to have loved : The life of Judith Merril_

Better to have loved : The life of Judith Merril : Judith MERRIL & Emily POHL-WEARY : 2002 : Between the lines : ISBN-10 1-896357-57-1 : 282 pages (y compris bibliographie et index) : coûte 25 USD pour un TP grand format, illustré en N&B, disponible chez l'éditeur : http://www.btlbooks.com/New_Titles/bettertohaveloved.htm.

Better to have loved.jpg

Récompensé par le Hugo de la meilleure non-fiction en 2003, cet ouvrage est donc une autobiographie de Judith Merril (née Judith Grossman), mise en forme par sa petite fille, Emily Pohl-Weary. Judith Merril est une des personnages clés de la SF américaine des années 60-70. Après des débuts d'auteurs solo ou en collaboration avec Cyril M. Kornbluth, sa carrière d'écrivain ne décollera jamais vraiment (au total à peine 5 romans et autant de recueils). Par contre elle sera toujours au coeur du genre (entre autres par ses nombreux amours : Pohl, Leiber, Miller...) et elle prendra une place importante dans celui-ci avec ses anthologies (dont la plus fameuse : England swings SF) qui feront découvrir la New Wave aux USA et sa direction de la partie critique de l'influent magazine F&SF. Refusant la guerre du Vietnam et les dérives de la société américaine, elle émigrera au Canada en 1968 où elle se fixera définitivement.

Homecalling (NESFA 2005).jpg

Cette autobiographie est constitué de l'assemblage de vingt-six chapitres (dont certains ne sont pas inédits, comme par exemple l'introduction au recueil The science fiction of Mark Clifton) écrits par Merril à divers moments de sa vie et parfois prévus expressément pour cet usage. Il suivent logiquement (pour ce type d'ouvrage) un ordre chronologique (même s'il faut parfois deviner les dates de certains évènements) mais ne présentent pas un rythme régulier (certaines périodes entières de la vie de l'auteur sont éludées). A noter qu'une bonne partie de l'ouvrage est constitué de transcription de lettres écrites par Merril ou ses correspondants. Un certain nombre d'annexe sont fournies : chronologie des évènements importants de sa vie, bibliographie, Dramatis Personae et index. L'ouvrage est illustré en N&B (photos, reproductions de couvertures, fac-similés), généralement sous forme de vignettes. 

The science fiction of Mark Clifton (SIUP 1980).jpg

Je dois avouer avoir du mal à comprendre comment cet ouvrage a pu avoir le Hugo. Non pas qu'il soit fondamentalement mauvais mais il souffre d'un certain nombre de handicaps. Tout d'abord, sa structure est peu lisible et le collage effectué ne prend pas puisque les textes repris d'autres sources obéissent à une logique qui n'est pas celle d'une autobiographie. Plus important pour l'amateur d'histoire du genre que je suis, c'est cette partie là (la participation très active et l'influence de Merril) qui est complètement passée sous silence. Les batailles des années 60-70 autour de la New Wave sont par exemple expédiées en quelques lignes au détour d'une page alors que son amour pour Toronto prend plusieurs chapitres. Ce n'est pas en soi répréhensible mais ce livre a été clairement "marketé" en direction du public SF (il n'y a qu'à voir la couverture et le sticker "Hugo Award Winner" rajouté dessus) alors qu'il n'est finalement que peu concerné.

Le fusilier Cade (Le Masque 1979).jpg

Outre cette démarche que je trouve un peu trompeuse, l'ensemble manque de chaleur et d'amour (malgré son titre et la vie "tumultueuse" de Merril) et peine à être intéressant avec même des parties franchement soporifiques (le fonctionnement détaillé de l'université de Rochdale). La reproduction in extenso de lettres personnelles n'est pas non plus passionnante et donne plus une impression de remplissage qu'autre chose. A cela s'ajoute une bibliographie assez riche mais parfois perfectible (l'édition Française de Outpost Mars est par exemple omise) et des illustrations dont la pertinence est discutable (une couverture d'Analog contenant un texte de Blish sous prétexte qu'il a été membre des Futurians). Au final un livre physiquement agréable (solide, beau papier, mise en page soignée) mais qui n'apporte que peu de choses pour l'amateur de SF qui est censé l'acheter.

L'enfant de mars (Le masque 1979).jpg

Note GHOR : 1 étoile