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14/09/2009

_The Darkover dilemma : Problems of the Darkover series_

The Darkover dilemma : Problems of the Darkover series : S. WISE : T-K Graphics : 1976 : pas d'ISBN : 28 pages (pas d'index ni de bibliographie) : prix inconnu pour un chapbook assez difficile à trouver.

The darkover dilemma.jpg

La série Darkover (Ténébreuse en VF) a toujours exercée une grande attirance sur une partie (plutôt féminine, attirée initialement par les Libres Amazones du lieu) des amateurs de SF. Grâce à l'attitude plus que bienveillante de Marion Zimmer Bradley (qui a largement ouvert les portes de son univers), il s'est crée une sorte de fandom spécialisé uniquement consacré à cette longue (plusieurs dizaines de romans et de nombreuses nouvelles) entreprise littéraire. Cet ouvrage est probablement l'une des premières manifestations concrète de cette mouvance.

The sword of Aldones (Ace Double F-153 1962).jpg

Ce court essai est à la fois une sorte d'arrêt sur image sur l'état de la série au milieu des années 70 (le dernier titre considéré étant The heritage of Hastur qui date de 1975) et une tentative d'en dégager les inévitables (puisque MZB semblait initialement ne pas avoir de "bible" pour sa série) problèmes de continuité. La première moitié de ce livre est donc une sorte de guide de Darkover, son histoire, ses habitants et ses coutumes qui s'appuie exclusivement sur des citations de l'auteur. La seconde partie liste, roman par roman, les diverses inconsistances que l'on peut y trouver. Cela va de la simple négligence de l'auteur (un personnage qui en connaît un autre par son nom page 28 de The spell sword et qui lui demande quand même comment il s'appelle page 36) à des questions de fond qui attendent une réponse (comme les hybridations entre les races de Darkover).

The planet savers (Ace Double F-153 1962).jpg

Etant peu familier avec l'oeuvre de Bradley, j'ai donc logiquement été plus intéressé par la première partie qui permet d'avoir un tableau assez clair du cadre de ce cycle important sans l'avoir lu. Ce tableau n'est d'ailleurs pas dépourvu d'esprit critique ce qui est rafraîchissant pour un texte de fan. Pour la seconde moitié, les interrogations soulevées par Wise d'une façon en tout cas bien argumentée me sont complètement passées au-dessus de la tête. Je laisse à des experts es-Darkover le soin de préciser si elles sont pertinentes et si MZB a pu, dans les ouvrages suivants, en corriger certaines.

Darkover landfall (DAW).jpg

Un livre qui parlera évidemment plus aux fans de MZB mais qui est un très bon exemple de la qualité et de l'intensité de l'appropriation de certains univers par les fans.

 

Note GHOR : 1 étoile

Commentaires

Bonjour,

J'ignorais l'existence d'un tel ouvrage. Merci de nous le faire connaître. Cette "para-"littérature n'est pas toujours appréciée à sa juste valeur et c'est fort regrettable.

Car, à y voir de plus près, tous ces companion books, concordances, chronologies, atlas et autres lexicographies fictionnelles sont une mine d'informations pour qui veut comprendre l'activité des créateurs d'univers (cohérence interne d'une écriture "cyclique", problèmes de retro-continuité, inventions formelles -inserts,épigraphes,fix-up,polytextualité-, créations linguistiques, enjeux du collaborative writing...)

J'imagine qu'une étude comparée nous apporterait un nuancier bien plus riche que tous les manuels de conworlding qui fleurissent aux États-Unis. Et d'un point de vue universitaire, je crois que certaines thèses sur les mondes secondaires, les livres-univers, les romans-mondes et les mondes possibles gagneraient à se plonger dans le concret de cette littérature de seconde main.

Mais ces "artefacts" (au sens de Saint-Gelais) sont également très précieux pour ce qu'ils témoignent de l'activité "xéno-cyclopédique" des "communautés interprétatives" que sont les fandoms. Je sais que vu de loin toute cette frénésie à distinguer le canon de l'apocryphe peut sembler dérisoire et picrocholesque...Et ce n'est pas totalement faux. Mais le fandom, pour employer une analogie qui vaut ce qu'elle vaut, est une sorte de pointe émergée de l'iceberg qu'est le lectorat.

La cristallisation d'une "vulgate" collective au sein d'un fandom me semble en effet être l'aboutissement d'un processus qui prend source dans notre propre parcours individuel de lecture : inscrire le "novum" dans un contrat de lecture, une "encyclopédie", qui permette à la fameuse "suspension of disbelieve" de s'exercer, réduire les incohérences chronologiques, cartographier, visualiser, apprécier les raffinements linguistiques des xénolectes...

Les companion books peuvent être le miroir de toutes ces micro-analyses plus ou moins formelles qui dessinent la réception d'une oeuvre par son public. De la création d'un monde fictionnel à sa réception par un public, l'apport des companion books est un élément d'appréciation qui a son intérêt.

J'ajoute enfin que certains companion books peuvent offrir au détour d'un article certains vertiges spéculaires. Ainsi, pour prendre l'exemple de la Dune Encyclopedia que je connais un peu, on ne peut qu'être amusé, voire fasciné, par certains paradoxes temporels.
Écrite dans une perspective "in-universe", la DE se présente comme l'oeuvre d'un collectif de savants historiens et archéologues ayant exhumé après 1800 ans d'anonymat les archives secrètes de l'Empereur Dieu de Dune. On se prend alors à lire des articles parfois surréalistes sur le caractère mythologique de l'existence de Paul Atreides (un peu à la manière de certains savants du 19° siècle qui doutaient de l'existence historique de Jesus de Nazareth), des rapports de fouille, des exposés ethnologiques sur le "Fremen de musée", de savantes tirades sur l'évolution linguistique du Chakobsa, etc...
Cette mise en abyme, loin de répondre aux judicieux silences du Cycle de Frank Herbert ne fait qu'ajouter de nouvelles conjectures aux autres, sans jamais vouloir imposer de fermeture omnisciente du réseau herméneutique. En d'autres termes, l'activité xéno-cyclopédique ou mythopoeïtique (au sens de Tolkien) n'est pas entravée par le companion book mais au contraire relancée sur d'autres pistes.
L'impossibilité de boucler le cercle interprétatif reste ainsi fidèle aux schémas narratifs de Frank Herbert. La DE fait d'ailleurs un usage systématique des épigraphes du Cycle donnant une matérialité inédite aux hypotextes fictionnels sur lesquels FH avait construit son récit (et il y aurait beaucoup d'utilité à comparer toute cette littérature "absente" que sont le Necronomicon, le Livre Rouge, l'Encyclopedia Galactica...)
Le Cycle de Dune ne serait ainsi qu'un modeste aperçu d'une bibliothèque fictionnelle qui autorise toutes les interprétations voire tous les paradoxes temporels.
Frank Herbert avait malicieusement préfacé la DE (seule entorse au régime in-universe) en n'excluant pas d'offrir dans ses volumes à venir du Cycle, des pistes sensiblement différentes de ce qui avait été esquissé dans la DE. Et c'est ce qu'il fit dans ses deux derniers volumes. De sorte que la DE peut être regardée comme une uchronie du Cycle, développant à partir d'un certain point de la chronologie (la mort de Léto II) sa propre vision des choses. À quoi il faut ajouter les inventions et élucubrations de Monsieur Anderson. Ce qui dessine au moins 2 univers parallèles pour les fans.

Saint-Gelais (toujours lui) avait dit des choses passionnantes sur ces multivers fictionnels où s'exerce avec plus ou moins d'audace l'érudition et la "transfictionnalité" des fandoms.

Je sais que les comics ont donné naissance à beaucoup d'études sur les confluences et interinfluences conjointes des créateurs et de leurs fans. J'ignore si cette réflexion connaît son pendant dans les oeuvres à prétention littéraire. Mais au cas où il n'y aurait rien de plus que l'article de Saint-Gelais, il y aurait beaucoup à faire dans cette direction (sans parler des enjeux du passage d'un média à l'autre).

On n'imagine pas tout ce qu'un companion book peut avoir à nous dire ....

Écrit par : Askaris | 14/09/2009

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