01/04/2009
_The science of fiction and the fiction of science_
The science of fiction and the fiction of science : Collected essays on SF storytelling and the gnostic imagination : Frank McCONNELL (rassemblés par Gary WESTFAHL) : McFarland (série "Critical explorations in SF&F" #12) : 2009 : ISBN-13 978-0-7864-3722-1 : 222 pages (y compris diverses bibliographies et index) : une trentaine d'Euros pour un TP neuf.
Cet ouvrage rassemble principalement les essais présentés par Frank McConnell lors des "Eaton conferences", un rassemblement annuel d'universitaires autour de la SF. Frank McConnell était un professeur de littérature américain (il est décédé en 1999) et surtout l'un des premiers membres du corps académique à s'être intéressé à la SF pour en dire autre chose que du mal.
Invité régulier et figure marquante des Eaton conférences, ses interventions étaient fort prisées et ont été compilées par Westfahl afin de rendre hommage à leur auteur.
Tout d'abord, on trouve donc dans ce livre 16 essais d'une dizaine de pages chacun correspondant à autant de présentations dont la plupart (toutes ?) ont déjà été publiées dans les divers ouvrages qui compilent les minutes de ces conférences (une bonne partie ayant été évoquée sur ce blog).
Même si les conférences avaient chacune un théme imposé (la nourriture, les aliens, la médecine...), McConnell poursuivait dans son style si particulier (passant du coq à l'âne, de La créature du lagon noir à Derrida, de Peanuts à Levi-Strauss) l'approfondissement de ses théories sur la SF. Tout d'abord, il trouvait la notion de genre était inutile, au sens que la seule différence faisable était entre bons et mauvais textes. Ensuite, si on le poussait dans ses derniers retranchements en faisant quand même référence à la SF comme un genre, il la voyait comme l'expression moderne du Gnosticisme (l'idée que nous sommes prisonniers de nos corps et d'un monde imparfait).
Ces textes de McConnell sont suivis de quelques pages d'appréciations posthumes par divers universitaires liés au genre (Benford, Slusser, Rose, Rabkin...) et d'une bibliographie complète (essentiellement des essais et quelques fictions policières).
Je ne voudrais pas passer pour un insensible après la lecture des témoignages si émouvants et si laudatifs de la dernière partie de l'ouvrage, mais la lecture de la prose de McConnell telle qu'elle rassemblée ici me donne une autre vision, moins admirable.
Il m'apparait en fait comme un type de personnage assez classique, celui d'un homme d'une grande culture (capable de citer de tête de nombreux auteurs et de bâtir un discours vraiment multimédia) et d'une grande intelligence, mais qui a choisi d'amuser la galerie plutôt que parler théorie. Une sorte de brillant excentrique capable de mettre les rieurs de côté par des positions outrées ("la SF ça n'existe pas") et de faire le spectacle en racontant ses chutes dans les parkings.
On trouve des gens qui jouent ce rôle dans toutes les conventions et c'est tant mieux parce que leur 'show' vaut toujours le déplacement, on y rit beaucoup et on y est amené à parfois se poser des questions pertinentes.
Hélas, ce genre d'intervention, quand elle devient une méthode systématisée passe difficilement la barrière de l'écrit. C'est le cas ici où la réunion de tant de textes coulés dans le même moule n'est pas flatteuse pour l'auteur.
Outre le fait que la SF ne soit que peu présente dans les discours de McConnell (gênant pour un ouvrage paru dans une collection qui s'intitule "Critical explorations in SF&F"), la juxtaposition des essais fait ressortir les redites (des citations reprises d'une année sur l'autre), les tics de langage et les obsessions (comme la haine de l'école littéraire Française). Surtout, la lecture à tête reposée rend nettement moins sensible au côté pyrotechnique de l'auteur qui apparaît justement comme ce qu'il est, une technique. La trentième mise en relation pseudo-sérieuse de Calvin & Hobbes et Camus ou de la poupée Barbie et Sigmund Freud (ce sont des exemples pris au hasard) n'arrive guère plus qu'à arracher un vague sourire au lecteur.
A cela s'ajoute le fait que l'idée de la SF comme littérature gnostique, le seul vrai apport de l'auteur et probablement le seul sujet qui aurait mérité une analyse approfondie, est presque seulement mentionnée "en passant". Contrairement à ce que pourraient laisser croire le sous-titre du livre, l'introduction et la quatrième de couverture, il n'y a pas plus d'une demi-douzaine de pages sur le sujet.
Il est dommage que la volonté de rendre hommage à l'un des leurs, même s'il était un homme formidable, ait conduit les universitaires proches de la SF à cautionner un tel ouvrage. Les essais de McConnell sont certes aimables, érudits et parfois amusants mais il y a tromperie sur la marchandise puisque ce n'est pas un ouvrage de réflexion sur la SF (ou si peu). A trente euros la plaisanterie, cela fait un peu cher même si certains essais (les premiers par exemple, sur le cinéma ou Wells) montrent un auteur plus focalisé sur l'étude du genre et donc plus percutant.
Note GHOR : 1 étoile
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