01/04/2010
_Je suis vivant et vous êtes morts : Philip K. Dick 1928-1982_
Je suis vivant et vous êtes morts : Philip K. Dick 1928-1982 : Emmanuel CARRERE : 1993 : Seuil : ISBN-10 2-02-020173-9 : 358 pages (pas d'index ni de bibliographie) : coûtait 120 FRF pour un TP non illustré, difficile à trouver dans cette version mais qui a été repris en poche chez Points en 1996.

Après son mémoire sur l'uchronie (Le détroit de Behring), ce livre est dû à la plume d'Emmanuel Carrère, une des figures intellectuelles française (romancier, cinéaste, essayiste) et héritier d'un dynastie de penseurs. Aimant s'encanailler dans les sous littératures, il n'en reste pas moins que son choix de P. K. Dick comme sujet d'étude fleure bon le conformisme mental de l'intelligentsia française (un peu de SF pour faire peuple mais pas trop de vaisseaux spatiaux ou de calmars) qui lui a au moins assuré une pleine page dans Télérama (no 2282).

Le livre utilise le canevas standard des biographies avec un structure purement chronologique en vingt-trois chapitres de taille assez homogène mais au rythme variable, les dernières années de la vie de l'auteur (les plus croustillantes) étant les plus développées. La vie de PKD y est racontée par un narrateur invisible qui nous fait parfois partager les pensées de l'auteur. On notera que l'auteur (Carrère) intervient parfois directement dans le cours du récit en nous proposant des apartés ou des petits jeux. A signaler que ce livre ne contient aucune annexe : pas d'index, pas de bibliographie si ce n'est une page de notes.

Comment juger cette "biographie" ? Certes l'écriture de Carrère est sans défaut et le tout est plutôt prenant et intéressant à lire comme portrait d'un illuminé à la vie décousue. Le problème est qu'il tombe (AMHA) dans le travers d'un grand nombre de biopics (un genre dont il est visiblement un véritable précurseur), à savoir que la frontière entre le réel et l'imaginaire est parfois ténue et qu'elle se trouve donc souvent allègrement franchie. Faire son héros plus beau ou plus grand que nature est une réaction normale mais méthodologiquement discutable. Plus gênant à mon sens est l'habitude assez constante de Carrère de se mettre dans la tête de Dick et de nous livrer ses pensées alors qu'aucune source existante ne permet de corroborer ses délires.

Finalement ce livre est plus la vie romancée de Dick telle qu'imaginée par Carrère qu'une biographie visant à une certaine objectivité comme celle de Sutin. C'est d'ailleurs à cette conclusion qu'arrive le chronique de Télérama qui finit par qualifier ce livre comme étant "Un beau roman d'Emmanuel Carrère". Ceci explique du coup la faible présence dans l'ouvrage du monde de la SF dans lequel Dick était tout de même parfaitement immergé. Carrère n'en tire que des effets faciles et ô combien prévisibles (un repaire de marginaux qui lisent des auteurs de seconde zone) et réussit même à raconter n'importe quoi comme quand il attribue à Boucher la célèbre citation de Carr sur la Bible telle qu'elle pourrait être publiée chez Ace. Un titre sans grand intérêt, à mettre donc plutôt dans la catégorie "romans" que dans celle des "essais".

Note GHOR : 1 étoile
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31/03/2010
_A James Gunn Checklist_
A James Gunn Checklist : Chris DRUMM : 1984 : Chris Drumm (série "Drumm Booklet" #16) : Pas d'ISBN : Non paginé (24 pages) : Coûtait 1.25 USD pour un format plus petit que A5 agrafé au centre et avec couverture rigide qui se trouve pour assez cher d'occasion.

Ce minuscule ouvrage fait partie de la série de bibliographies éditées (et souvent réalisées) par Chris Drumm dans les années 80 (et qui dureront jusqu'au 90). Leur originalité était de couvrir des auteurs plutôt atypiques (Lafferty, qui verra une partie de sa fiction publiée par l'éditeur) ou à la réputation assez faible (Reynolds). Ici, elle s'intéresse à James Gunn, un auteur de midlist typique des années 60-70, un spécialiste du fix-up (la plupart de ses romans sont de ce type) qui connaîtra une certaine notoriété de par l'adaptation à la télévision de The immortals. Il est aussi un des rares personnages à posséder légitimement une double casquette d'écrivain et d'universitaire.

Cette bibliographie commence par une introduction de quatre pages signée par Stephen H. Goldman, un collègue de Gunn qui passe en revue ses principaux textes. La seconde partie utilise le format des premiers fascicules de Drumm, à savoir un listing par ordre chronologique des textes de l'auteur. On y trouve donc, regroupés par année (de 1947 à 1984) et numérotés séquentiellement, les oeuvres de l'auteur (quels que soient leur format ou leur type). Pour chaque item, un certain nombre d'informations bibliographiques sont données suivant le type, par exemple pagination et prix pour les livres, parutions successives pour les textes courts, de même que des informations ponctuelles. A noter que les réimpressions (dans la même collection) sont listées de même que les éditions étrangères (plus nombreuses qu'il n'y paraît). Deux courts extraits de lettres de Gunn datant de 1984 donnent ensuite des précisions sur ses projets de l'époque et un index par titre permet d'exploiter tout cela.

Sur un plan technique, le niveau est bon, surtout si l'on compare ce titre avec les premiers (comme le Clement). Même si on reste clairement dans la production artisanale à la machine à écrire, les coquilles et ratures sont rares et l'ensemble est lisible (malgré un format plutôt petit). La couverture internationale est un vrai plus surtout dans ce cas où elle est d'une qualité étonnante pour un ouvrage américain : les deux éditions de Le pont sur les étoiles sont par exemple mentionnées (même si la réimpression de 1979 du Masque est omise), les traducteurs sont précisés. On regrettera toutefois qu'elle se limite généralement aux romans.

Un auteur comme Gunn pose un certain nombre de problèmes bibliographiques : quelques changements de titres (The mind master = The dreamers), des expansions de nouvelles (Sine of the Magus) et surtout un mode de production des romans à partir de nouvelles existantes (à la Van Vogt). Tout cela nécessite un outil bibliographique affûté pour pouvoir espérer s'y retrouver sans avoir à (re)lire l'intégralité de la production de l'auteur, certes peu volumineuse dans l'absolu mais quand même de taille. Heureusement, Drumm se montre à la hauteur de la tâche et est le seul à l'avoir menée à bien. C'est fort louable.

Note GHOR : 3 étoiles
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30/03/2010
_Millennial Mythmaking _
Millennial Mythmaking : Essays on the power of science fiction and fantasy literature, films and games : John PERLICH & David WHITT : 2010 : McFarland : ISBN-13 978-0-7864-4562-2 : x+202 pages (y compris index) : coûte 40 USD pour un TP non illustré, disponible chez l'éditeur : http://www.mcfarlandpub.com/book-2.php?id=978-0-7864-4562-2.

Vous me permettrez d'expédier cet ouvrage en un minimum de temps. Il s'agit d'un recueil de neuf essais par des illustres inconnus dans le monde de la SF (ils sont presque tous et toutes "professors of communication") sur des sujets vaguement en relation avec la SF&F et les mythes (avec force citations de Campbell, mais pas celui d'Astounding, l'autre). Je ne suis pas un spécialiste sur la partie mythes, mais je peux dire par contre que la connaissance de la SF des intervenants est au mieux un simple vernis. En gros, c'est la SF&F au cinéma (Harry Potter, La planète des singes, Ghost in the shell, Le labyrinthe de Pan) ou à la télévision (Star Trek, Heroes).

On peut se demander comment un tel collage de textes sans aucun intérêt a pu voir le jour. Par exemple on a presque trente pages d'un essai surréaliste (une passion qui naît quand l'auteur a vu un des films à la télévision) sur l'utilisation de la couleur dans la série Harry Potter qui en liste toutes les occurrences dans le texte pour aboutir à la conclusion que, quand Rowling utilise des objets rouges ou verts (ce sont aussi les couleurs de Noël nous précise l'auteur), c'est important et symbolique (de quoi n'est d'ailleurs pas vraiment explicité), la preuve : Harry Potter a les yeux verts et Voldemort les yeux rouges. On trouve aussi dans cet ouvrage une discussion sûrement très intéressante sur Les triplettes de Belleville mais dont la présence dans un ouvrage consacré au genre est plutôt mystérieuse. Le reste est à l'avenant, une couche de jargon Campbellien plaquée sur un lot de films loués dans le vidéo-club du coin.

A 40 Dollars le livre de 200 pages, on frise l'escroquerie, surtout quand les prestations annexes sont d'un aussi piètre niveau, comme cet index qui donne des numéros de pages erronés. On pourra juste sauver de ce naufrage le texte sur les avatars féminins de Second Life (dont le rapport réel avec la SF est pour le moins discutable), qui pose certaines questions intéressantes (Pourquoi la norme est-elle pour toutes les femmes de ressembler à Angelina Jolie ?) mais n'apporte guère de réponses structurées.
Note GHOR : 0 étoile
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29/03/2010
_James H. Schmitz : A bibliography_
James H. Schmitz : A bibliography : Mark OWINGS (et Janet KAGAN) : 1973 : Croatan House : ISBN-10 0-08838-902-8 : non paginé (18 pages au total) : prix inconnu pour un petit fascicule format A5 type fanzine avec couverture cartonnée et agrafage central, difficile à trouver.

Publié par la maison d'édition co-fondée par Owings (qui sortira au moins un tome similaire sur Heinlein), ce petit ouvrage est donc une bibliographie de James H. Schmitz. Celui-ci est l'un des authentiques "petits maîtres" de la SF. Assez peu traduit et finalement assez peu productif, il n'en reste pas moins un auteur dont on se souvient avec plaisir. Il faut donc remercier Eric Flint et Baen d'avoir récemment (au début des années 2000) remis à la disposition des nouveaux lecteurs une bonne partie de son oeuvre (les séries Telzey, Trigger et Hub).

D'une façon assez surprenante, la plus grosse partie (une douzaine de pages) de cette bibliographie est en fait constituée par un texte (The Natural heroine of James H. Schmitz) de Janet Kagan, une auteur de SF qui a fait partie de l'école Analog dans les années 90 (Hugo 1993 pour The nutcraker coup). Elle y fait l'éloge de Schmitz sous un angle assez intéressant, celui de son utilisation intensive de personnages principaux féminins qui échappent aux stéréotypes sexués. On trouve ensuite la bibliographie proprement dite. Celle-ci est organisée par ordre alphabétique et couvre uniquement les parutions en langue anglaise en mêlant romans et nouvelles. Elle fournit les informations bibliographiques habituelles permettant soit de discerner les diverses éditions soit de localiser les textes courts. Une chronologie des oeuvres (de 1943 à 1974 -sic-) termine l'ouvrage.

Il n'y a rien à dire sur l'article de Kagan qui montre, sous la plume d'une pratiquante du genre, que celui-ci n'est pas forcément peuplé que de héros mâles débordant de testostérone, y compris sous la plume d'auteurs masculins. C'est d'autant plus intéressant que Schmitz écrivait essentiellement pour Analog, une revue qui a toujours été parmi les plus influentes et les plus connotées "conservatrice". Appuyé par de nombreux extraits, il montre un auteur d'un modernisme assez étonnant.

La partie strictement bibliographique est nettement moins convaincante. Tout d'abord elle n'est techniquement pas exempte de défauts au niveau exactitude (certaines reprises de nouvelles en anthologies sont oubliées). Elle est aussi, d'une façon logique pour un livre qui va sur ses quarante ans, très dépassée temporellement. Elle souffre aussi d'une organisation assez peu lisible avec un mélange permanent entre recueils et nouvelles homonymes (les premiers sont uniquement identifiables par leur soulignement) et un texte très dense organisé en blocs qui aurait gagné à être aéré par quelques retours chariot. Malgré tout une tentative plus qu'honorable pour un auteur qui le mérite largement.

Note GHOR : 2 étoiles
08:33 | 08:33 | Index, dictionnaires & bibliographies | Index, dictionnaires & bibliographies | Lien permanent | Lien permanent | Commentaires (0) | Commentaires (0) | Tags : anglais, schmitz, 2 étoiles | Tags : anglais, schmitz, 2 étoiles
26/03/2010
_Jack Vance : Critical appreciations and a bibliography_
Jack Vance : Critical appreciations and a bibliography : A. E. CUNNINGHAM (editor) : 2000 : The British Library : ISBN-10 0-7123-1102-5 : 232 pages (y compris bibliographie mais pas d'index) : coûtait 15 GBP pour un HC avec jaquette au tirage limité à 750 exemplaires, illustré de dessins originaux (de Paul Rhoads, qui a aussi fait la couverture), existe en version signée et augmentée de photos (-1103-3).

Cet ouvrage britannique est un recueil d'essais consacré à Jack Vance. Comme souvent quand il s'agit de cet auteur, c'est un produit à tirage limité et qui existe dans plusieurs déclinaisons. Piloté par Cunningham, le bibliographe de la bande, il est contemporain de et aussi lié à la VIE (la Vance Integral Edition, voir http://www.vanceintegral.com/), un projet collaboratif et pharaonique de publication de l'intégrale des textes de Vance qui montre que cet auteur est une valeur sûre pour vendre des éditions de luxe fort onéreuses à un petit groupe de fanatiques, une chose que Underwood-Miller (et maintenant Subterranean) ont bien comprise depuis longtemps.

Bénéficiant de textes dus aux plus grandes plumes du genre : auteurs (Ellison, Simmons, Wolfe) ou commentateurs (Langford, Shippey), ce livre comprend une dizaine d'essais de taille assez variable (de moins de dix à plus de quarante pages). On y trouve, outre de nombreuses évocations des textes de l'auteur (largement appuyés sur de longues citations), une analyse du thème de la vengeance, un petit segment autobiographique, l'avis d'un des éditeurs de Vance (Miller). Un des gros morceaux (soixante pages) du livre est une bibliographie (VO) qui couvre : les premières parutions (pour les nouvelles), les premières (ou remarquables) éditions (pour les livres), les adaptations et les livres secondaires. Cette bibliographie comprend aussi une chronologie et un index. A noter qu'une partie des textes seront traduits en VF dans Les univers de Jack Vance.

Malgré le "critical" dans son sous-titre, cet ouvrage est plus un "companion" en hommage à Vance qu'une analyse critique. On est clairement dans la célébration et le souvenir ému plutôt que dans la déconstruction littéraire d'un auteur important mais qui, comme tant d'autres avant lui, a peut-être écrit le ou les "livres de trop". Du coup, ce titre offrira plus de plaisir à l'amateur de longue date qui se voit replongé dans des mondes familiers qu'à celui qui va chercher à comprendre comment fonctionnaient les récits de l'auteur.

Malgré tout, c'est un ouvrage d'une grande qualité (belle jaquette, reliure solide, papier luxueux) qui, une fois n'est pas coutume, est proposé à un prix extrêmement attractif au regard de ses prestations. On pardonnera donc aisément son côté parfois un peu trop 'fan-boy' et sa partie bibliographique qui, si elle est bien faite et limpide, n'offre quand même pas les même prestations que le Currey (pour les premières éditions) ou que l'une des bibliographies plus complètes (et plus internationales) de Vance qui existent (Levack & Underwood, Benson & Stephensen-Payne ou Hewett & Mallett). Il suffit simplement de se laisser emporter par les souvenirs de la voix d'un conteur hors pair.

Note GHOR : 2 étoiles
07:57 | 07:57 | Etudes mono-auteur | Etudes mono-auteur | Lien permanent | Lien permanent | Commentaires (0) | Commentaires (0) | Tags : anglais, vance, 2 étoiles | Tags : anglais, vance, 2 étoiles