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04/10/2022

_The Great Heinlein Mystery_

The Great Heinlein Mystery : Science Fiction, Innovation and Naval Technology : Edward M. WYSOCKI Jr. : 2012 : Visiblement auto-publié : ISBN-13 978-1-47741-020-2 (la fiche ISFDB du titre) : 287 pages (y compris appendices, index et bibliographie) : coûte 24.95USD pour un tp avec quelques illustrations en n&b, disponible dans toutes les bonnes librairies en ligne (le livre est visiblement un POD).

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Sous la plume de Edward M. Wysocki (à qui l'on doit le plus tardif An Astounding War sur un thème proche), ce livre est le résultat d'un projet plutôt original. En effet l'auteur a été interpellé par une citation de RAH (initialement dans The Science Fiction Novel, un recueil d'essais paru chez Advent) qui évoquait un "gadget" mis en service par la marine américaine suite à la parution d'une de ses nouvelles sans toutefois apporter plus de précisions quant à l'objet lui-même qui était censément couvert par le secret défense.

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C'est cette quête, menée durant plusieurs années (et qui continue encore), que nous raconte l'auteur. De sa découverte de la citation initiale à ses recherches parmi les étudiants de l'école navale en passant par l'exploration minutieuse de la correspondance de RAH et les multiples lectures de ses nouvelles, Wysocki nous détaille toutes les tâches accomplies pour tenter d'éclaircir ce "mystère". Ce faisant, il détaille certains sujets connexes (le processus d'innovation dans la Navy, l'école navale US, certains systèmes de détection utilisés dans la 2GM...) au travers de nombreuses sources. Cette sorte de rapport d'enquête est accompagné de divers appendices, d'une bibliographie et d'un index.

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Disons-le tout de suite, la quête de Wysocki se révèlera infructueuse, le "gadget" gardant son mystère à la fin de l'histoire même si quelques pistes sont privilégiés par l'auteur au vu des recoupements possibles (mais je ne dirai rien). Outre une foule d'informations "périphériques", c'est la folie même de l'entreprise (écrire un livre sur quelques lignes de RAH) et le côté quasi policier du récit qui rendent l'ouvrage sympathique et lisible. On peut penser, une fois le livre refermé, "tout ça pour ça" (comme je l'ai fait) mais avoir accroché à la lecture (comme je l'ai fait aussi). En tout cas, une démarche singulière à lire pour les amateurs de la SF de l'âge d'or.

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Note GHOR : 2 étoiles

12/08/2022

_The Reading Protocols of Science Fiction_

The Reading Protocols of Science Fiction : Discourses on Reading SF : James GUNN & Michael R. PAGE (editor) : 2021 : Advent (ReAnimus Press) : ISBN-13 9794867207919 (inconnu de l'ISFDB) : 235 pages (pas d'index ni de bibliographie globale) : coûte 29.99 USD pour un hc non illustré sans jaquette, disponible chez l'éditeur (en fait via Amazon pour les versions papier), existe aussi en tp et en ebook.

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Une des questions que revient le plus fréquemment à propos du genre est de comprendre pourquoi certains lecteurs (pourtant chevronnés) se trouvent être dans l'incapacité d'accrocher ou de simplement lire un texte de science fiction. C'est une expérience que nous avons tous faite, cette réaction du type "je n'y comprends rien" ou "c'est vraiment pas pour moi" quand leur proposez un de vous ouvrages favoris. À cette interrogation, il existe habituellement deux réponses théoriques qui sont finalement assez proches. La première (St Gelais, Broderick, Bréan) est liée à intertextualité forte du genre et suppose que la difficulté de passer d'une "encyclopédie" (un système de référence décrivant l'univers du texte) mundane (des téléphones portables, une gravitéà 1g) à une "xénoencyclopédie" propre au genre (des implants cérébraux, la planète Mesklin) est un saut trop important pour certains lecteurs. La seconde (Delany, Gunn) part du principe que la lecture même d'un texte de SF met en jeu une façon de lire différente en s'appuyant sur des protocoles de lecture spécifiques qui permettent de décrypter/mettre en perspective/extrapoler des informations de simples bouts de phrases comme "son monde explosa", "la porte se dilata" ou (l’exemple utilisé dans le livre par Delany) "monopole magnet mining operations in the outer asteroid belt of Delta Cygni".

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Du coup, Damon Kinight, jouant l'avocat du diable, affirma lors d'un thread sur le forum sff.net en 1996 que de tels protocoles de lecture propres au genre n'existaient tout simplement pas. Suite à la mort de Gunn (en 2020), son héritier spirituel, Michael R. Page eut l'idée de publier la transcription de ces échanges ainsi que pas mal d'autre matériel autour de ce concept. Utilisant sa propre maison d'édition ReAnimus Press (qui a d'ailleurs racheté le catalogue d'Advent), il produisit en 2021 cet ouvrage qui peut-être considéré comme une œuvre posthume de Gunn. On trouve au sommaire une dizaine de textes de longueurs très différentes : une préface, une longue introduction, la transcription du thread de sff.net, un essai de Delany sur les protocoles de lecteurs ainsi que plusieurs essais de Gunn autour du sujet (il y a même une nécrologie de Knight parue dans Nebula Awards Showcase 2004). On notera l'absence d'index et de bibliographie (sauf pour l'introduction).

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Une fois passé le côté particulièrement brouillon de l'ensemble et digéré le fait qu'une partie n'est pas inédite, cet ouvrage n'est pas sans présenter un certain intérêt, surtout par les discussions qu'il peut faire naître sur l'existence ou non de ces fameux protocoles de lecteurs spécifiques au genre. Toutefois avec une partie principale, la transcription du thread qui, comme c'est prévisible de par le déroulement même de ce type d'échange en ligne (cf. celui sur la métaphysique en VF), est largement la moins intéressante. Desservi par un manque de structuration, cet ouvrage, non indexé, est difficilement exploitable, il est donc à ranger au rayon des bonnes idées gâchées par une exécution perfectible. En fait, le sujet mériterait plutôt un ouvrage qui ne soit pas un simple hommage à Gunn, mais une vraie réflexion de fond qui s'appuierait sur le matériau rassemblé. Dommage.

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Note GHOR : 1 étoile (2 si vous êtes fana de Gunn)

09/08/2022

_The Science Fiction Mythmakers_

The Science Fiction Mythmakers : Religion, Science and Philosophy in Wells, Clarke, Dick and Herbert : Jennifer SIMKINS : 2016 : McFarland (série "Critical explorations in Science Fiction and Fantasy" #54) : ISBN-13 978-0-4766-6809-3 (la fiche ISFDB du titre) : 190 pages (y compris bibliographie et index) : coûte 29.95 USD pour un TP non illustré disponible chez l'éditeur (), semble aussi exister en ebook (-2725-0).

anglais,2 étoiles

Paru dans la principale collection d'ouvrages de référence de McFarland (on notera que certains titres pourtant relatifs au genre n'en font pas partie), cet ouvrage est dû à une enseignante d'anglais australienne. Il s'agit de son unique texte connu et je pense qu'il est constitué du contenu de sa thèse faite sous la direction de Van Ikin (qui lui est connu des habitués de ce blog). Sans être particulièrement original, l'axe d'approche de Simkins est de montrer que la SF (la Fantasy est hors de son champ d'étude) est une sorte de machine à générer des mythes adaptés à notre époque technologique.

anglais,2 étoiles

Le livre est donc organisé, outre une longue introduction, une courte conclusion, en quatre gros "blocs" d'une quarantaine de pages.  Comme indiqué dans le sous-titre de l'ouvrage, Simkins évoque successivement les aspects potentiels de "création de mythes" des auteurs suivants : Wells (notamment A Modern Utopia), Clarke (2001 et ses suites ainsi que Childhood's End), Dick (Ubik et The Three Stigmata of Palmer Eldritch) et Herbert (Dune et ses suites ainsi que The Santaroga Barrier). Chaque auteur est donc essentiellement relié à ses œuvres majeures (le reste de leur production semble un peu méconnu de l'auteur) dans une lecture "croisée" avec les diverses théories philosophiques. Outre plusieurs pages de notes copieuses, l'ouvrage propose une bibliographie et un index.

anglais,2 étoiles

Comme d'habitude avec les titres de cette collection, la première impression est que, finalement, il n'y a pas tant que cela à lire. Avec à peine 150 pages de texte (dont 120 consacrées au développement de la thèse principale), cela fait cher de la page (surtout qu'initialement ce volume coûtait 35.00 USD) pour un ouvrage physiquement sans grand charme. En ce qui concerne le travail de Simkins, on a plus l'impression de la juxtaposition de quatre gros articles sur des sujets spécifiques que d'une réflexion sur le genre dans sa globalité. Toutefois, dans les étroits créneaux choisis, la lecture de l'auteur est parfois originale et son argumentation bien menée, ce qui donne un ensemble sans grande structure globale mais qui ajoute sa réflexion à l'édifice.

anglais,2 étoiles

En fait, la question que je me suis surtout posée n'a aucun rapport avec le sujet du livre, mais concerne la façon dont l'éditeur sélectionne ses textes. Autant les premiers titres de la collection avaient une certaine tenue et étaient écrits par des "pointures" (Westfahl, Slusser, Mendlesohn...) autant les derniers parus donnent l'impression de l'utilisation systématique de néophytes (sont-ils moins chers ?) ou d'une spécialisation à outrance dans un marché de niche (cf. le #50 : Star Wars in the Public Square: The Clone Wars as Political Dialogue dont le titre fait vraiment envie). Une autre remarque amusante est le fait que l'on constate très vite que Simkins, en tant qu'Australienne, est exclusivement imprégnée d'une culture critique du genre d'origine  britannique. Cela se voit tout de suite dans l'usage des sources de référence (Aldiss, Wingrove, la SFE...) et dans certaines positions sur l'histoire de la SF. Sans doute que le même ouvrage, écrit par une Américaine aurait-il une bibliographie secondaire et des références très différentes.

anglais,2 étoiles

Note GHOR : 2 étoiles

13/07/2022

_Minding the Future_

Minding the Future : Artificial Intelligence, Philosophical Visions and Science Fiction : Barry DAINTON & Will SLOCOMBE & Attila TANYI (editors) : 2021 : Springer (série "Science and Fiction") : ISBN-13 978-3-030-64268-6 (inconnu de l'ISFDB) : x+181 pages (y compris appendices, bibliographie et index) : coûte une bonne trentaine d'Euros pour un tp non-illustré, disponible chez l'éditeur, existe aussi en ebook (-64269-3).

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Ce titre est l'un des derniers sortis dans la collection "Science and Fiction", qui, outre des ouvrages de référence parfois évoqués ici, comporte aussi bizarrement de purs titres de fiction (souvent écrits par d’illustres inconnus, des scientifiques pour la plupart). Ici, il s'agit d'un recueil d'essais de la plume de parfaits inconnus du moins dans le domaine des écrits sur le genre puisqu'il s'agit essentiellement de professeurs soit de philosophie soit d'informatique. Le thème unificateur de cet ensemble d'inédits est donc (en simplifiant) les diverses représentations de l'IA dans la SF écrite et visuelle (cinéma et séries TV) et la comparaison de ces images avec la réalité "technique" du domaine.

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Ce recueil comporte donc une introduction, dix essais d'une vingtaine de pages chacun (certains sont significativement plus longs), l'habituelle short-story (ici par un des editors, qui aurait, comme d'habitude dans cette série, pu éviter de nous infliger son texte), un glossaire, une chronologie des avancées dans le domaine de l'IA, la bio des auteurs (c'est important ça, la bio des auteurs, certains -les trois editors- ont même droit à leur photographie), une micro bibliographie et un index. Les sujets abordés vont de questions de portée générale (les IA et l'amour, la Singularité) à des études resserrées sur des sujets et/ou des œuvres précis (les "governor modules" dans la série AssaSynth de Martha Wells, la série Ancillary de Ann Leckie le film Ava, les IA chez Stanislas Lem).

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Comme souvent avec ce type d'ouvrage, le résultat est très hétérogène pour le lecteur que je suis, en fonction de mon intérêt pour le sujet et de la qualité perçue des textes. Globalement, c'est un ensemble de bonne facture qui, même s'il n'évite pas toujours des redites (la victoire du programme AlphaGo) et qu'il contient des essais dont le propos véritable est plutôt nébuleux ou trop général, offre matière à réflexion en conjonction avec le genre. En gros, plus les essais sont concentrés sur des œuvres du genre, plus je les ai appréciés. Mentions spéciales donc aux deux longs textes sur Martha Wells (Slocombe & Dennis) et Ann Leckie (Roy-Faderman, à celui sur Ava (Bohm). Le reste de l'ouvrage étant, à mon sens, moins intéressant.

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Note GHOR : 2 étoiles

12/07/2022

_The Thing's Incredible!_

The Thing's Incredible! : The Secret Origins of Weird Tales : John LOCKE : 2018 : Off-Trail Publications : ISBN-13 978-1-935031-24-6 (la fiche ISFDB du titre) : 299 pages (y compris appendices, bibliographie et index) : coûte 35.00 USD pour un tp (POD) non illustré, disponible chez l'éditeur (mais via Amazon).

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Weird Tales est sans doute le plus célèbre des des magazines associés au genre. Un peu comme le postérieur (et parfois proche) Unknown, de part son positionnement au marges, ses auteurs emblématiques (HPL, CA Smith et tant d'autres...), une certaine permanence (avec des éclipses toutefois) et ses lecteurs fanatiques (bien que parfois peu nombreux), il s'est constituée une légende autour de ce titre qui est de plus l'un des plus anciens du domaine (son premier numéro est sorti en mars 1923). Malgré cela, il restait un certain nombre de zones d'ombre autour de la genèse exacte du magazine et sur les deux premières années (1923-1924) assez chaotiques de son existence qui ont vu, outre plusieurs modifications fondamentales de maquette et d'orientation, un changement d'éditeur et de rédacteur en chef.

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C'est donc à un travail de détective qué s'est livré John Locke (un spécialiste américain de l'histoire des pulps) pour nous raconter par le menu ces deux premières années d'existence du magazine. Employant une narration chronologique et s'appuyant sur un grand nombre de sources (même si les principaux protagonistes ont eu tendance à rester muets pour des raisons que l'on supposera), c'est une véritable travail de fourmi qui a été accompli par l'auteur (les trente pages de notes en témoignent). On croise aussi au cours de la narration un certain nombre de figures connues, soit issues du genre comme Clark Ashton Smith, HP Lovecraft, Arthur J. Burks ou Otis Adlebert Kline, soit extérieures comme Houdini (le magicien) qui sont finement étudiées. En bonus, on trouvera outre un index et une (petite) bibliographie, plusieurs appendices utiles.

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Je dois avouer que je ne pensais pas qu'il était possible de tirer 250 pages de récit de la naissance d'un magazine (même aussi célèbre que Weird Tales), et bien je me trompais. Le livre de Locke est très intéressant à lire (comme un roman ^_^) et la qualité de ses recherches force le respect. Même s'il est conduit à faire pas mal de suppositions, cette plongée dans le monde des pulps et dans les débuts du genre se révèle passionnante. Certes, le sujet est plutôt étroit et parlera surtout à une frange du lectorat, mais l'enquête de Locke mérite que l'on s'y intéresse. A lire pour se plonger 100 ans en arrière, au commencement.

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Note GHOR : 2 étoiles (au moins)