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15/12/2008

_10 Catastrophes_ & _10 Récits sur le temps_

10 Catastrophes: Fréderick BAAS & Alain GARGUIR & Yves MOUQUET : Maison de la Fiction : 1988 : ISBN -10 2-87765-000-6 : 43 pages : quelques Euros en neuf via e-bay pour un chapbook.

10 Récits sur le temps: Fréderick BAAS & Alain GARGUIR & Yves MOUQUET : Maison de la Fiction : 1988 : ISBN -10 2-87765-001-4 : 43 pages : quelques Euros en neuf via e-bay pour un chapbook.

10 Catastrophes.jpg       10 Récits sur le temps.jpg

Ces deux petits ouvrages sont donc des guides de lectures destinés (je paraphrase) à aider les lecteurs ou les intervenants littéraires à se retrouver dans le maquis de la SF et à constituer une bibliothèque de base sur les thèmes abordés.

Ils partagent la même architecture :
- Une introduction sur le principe des ces guides.
- Un mode d'emploi.
- Une présentation du thème (2 pages).
- 10 fiches de lecture comprenant une sorte de fiche technique (style carte d'index de bibliothèque) et une courte fiche de lecture (1 page).
- Un lexique.
- Une bibliographie annexe (une vingtaine de titres supplémentaires).

Pas grand chose à dire sur ces ouvrages. La sélection des textes étudiés est classique. On va  de Anderson à Wells pour le temps et de Ballard à Wylie pour les catastrophes. Le mélange entre textes récents  et anciens est correct (de Barjavel à Powers) et les équilibres nationaux respectés (30% de francophones + 1 allemand).

La fin du rêve (OPTA 1976).jpg

Les notes de lectures sont très brèves (une quarantaine de lignes au total) et se bornent à un résumé du texte suivi d'un paragraphe d'évaluation. Dans la pratique ce sont donc plutôt des notules et leur côté hyper-schématique vaut aussi pour le reste des guides (les présentations par exemple).

Ajoutons quelques bugs dans les fiches techniques et on obtient des ouvrages dont la plus-value me parait bien mince et l'objectif peu clair.

Une porte sur l'été (JL 1978).jpg


En fait, le point le plus intéressant est, en ce qui me concerne, la tentative que l'on voit transparaître au fil des pages d'une codification des genres de la SF. Ce projet de taxonomie du genre est un serpent de mer qui resurgit périodiquement et auquel tout fan s'est attelé au moins un fois dans sa vie. C'est un vieux rêve que de pouvoir classer tout ouvrage de SF dans un schéma global et bien ordonné.

Comme souvent, cela vire à l'usine à gaz géante avec une multiplication des critères pour pouvoir rendre compte des caractéristiques de chaque oeuvre.

Ici, on a donc pour chaque texte (entre parathèses les valeurs pour un des titres) les critères suivants : un thème (Temps) et un sous-thème (Voyage), un cas (Ramification), un genre (Time-opéra) un genre-bis (Aventure), une caractéristique (Maîtrise), un type (Machine) et une forme (R<N).
Pour info cet ensemble de critères permet de définir La patrouille du temps.

La patrouille du temps (Marabout).jpg

Trop complexe, cette brillante construction intellectuelle s'effondre sous son propre poids en à peine 20 oeuvres, sans atteindre les 42210 univers de la SF de l'inénarable Guy Bouchard.

Note GHOR : 1 étoile (pour le côté sympathique de cette entreprise fanzinesque)

14/12/2008

Les 4 étoiles du GHOR

Des esprits chagrins pourraient croire que les 4 étoiles au GHOR sont un mythe (^_~). Il n'en est rien.

Je rappelle que, dans mon idée, cette note correspond aux 20 ouvrages de référence indispensables. Rapporté aux presque 700 ouvrages de ce type qui s'entassent sur les rayons de ma bibliothèque, on comprendra qu'une telle appréciation reste très rare.

Dans la pratique, ces ouvrages sont ceux que je sors en premier ou le plus souvent pour vérifier un point précis ou ceux dont l'état montre que je les ai feuilletés plus que de raison et pour lesquels j'ai un attachement sentimental.

Juste pour le fun, les 4 étoiles (actuels) sont :

The encyclopedia of science fiction (Clute & Nicholls)

The encyclopedia of SF (Orbit).jpg

 The encyclopedia of Science Fiction and Fantasy (Tuck, 3 volumes)

The encyclopedia of SF vol1.jpg  The encyclopedia of SF vol2.jpg  The encyclopedia of SF vol3.jpg
Anatomy of wonder (Barron, ici la 5ème édition)
Anatomy of wonder (5th edition).jpg
Double your pleasure, the Ace SF double (Corrick)
Double your pleasure.jpg
Le rayon SF (Delmas & Jullian, ici la 2ème édition)
Le rayon SF2.jpg
Science fiction and fantasy authors A bibliography of first printings of their fiction (Currey)
SF & fantasy authors 1st printings.jpg
Science-fiction The Gernsback years (Bleiler)
Science fiction the gernsback years.jpg
History of the science fiction magazines (Ashley, 3 volumes à ce jour)
The time machines.jpg   Transformations.jpg  Gateways to forever.jpg
Science fiction magazine story index 1926-1995 (Murray)
SF Magazine story index 1926-1995.jpg
Science fiction, fantasy and horror reference (Justice)
Science fiction, fantasy and horor reference.jpg
Strange constellations (Blackford, Van Ikin, McMullen)
Strange constellations.jpg
Science Fiction, Fantasy and Weird fiction magazines (Tymn & Ashley)
SF, F & Weird Fiction magazines.jpg
A biographical dictionary of science fiction and fantasy artists (Weinberg)
A biographical dictionary of science fiction & fantasy arti.jpg
The know and the unknown The iconography of science fiction (Wolfe)
The known and the unknown.jpg
The mechanics of wonder (Westfahl)
The mechanics of wonder.jpg
Et mon tout premier : Encyclopédie visuelle de la science-fiction (Ash)
Encyclopedie visuelle de la sf.jpg

12/12/2008

_Science-Fiction : Les frontières de la modernité_

Science-Fiction : Les frontières de la modernité  : Raphaël COLSON & André-François RUAUD : Mnémos : 2008 : ISBN-13 978-2-35408-044-0 : 349 pages (y compris biblio et index) : 24 Euros en neuf pour un TP (solidité à voir).

Science-fiction Les frontières de la modernité.jpg

Cet ouvrage est une histoire de la SF qui commence au XVIème et se termine au XXIème. Elle couvre tous les médias associés au genre (textes, BD, comics, TV, Jeux, Manga, Cinéma, DA...) et fait le choix de largement insérer la SF dans le contexte historico-géographico-socio-économique des époques et des lieux de production.

Il est donc logiquement organisé de façon (globalement) chronologique en quatre parties principales :

- Les précurseurs (XVI, XVII & XVIIIèmes).
- L'imaginaire européen (XIXème).
- L'imaginaire américain (XXème).
- L'imaginaire asiatique ? (XXIème).

Chaque partie est ensuite découpée d'une façon peu claire, d'abord sur des critères temporels, puis géographiques (par aire de production) et parfois thématiques.

Suivent une bibliographie (sommaire et écrite gros) et un index. On notera la présentation du texte sur deux colonnes (sauf bizarrement les seules pages 224 & 228) agrémentée d'illustrations N&B de taille variable, parfois non légendées et/ou non attribuées aux illustrateurs (pour les couvertures de livres).

 

Voilà un livre qui commence mal. A la fois sur le plan formel puisque dès la première page, on a une jolie petite coquille avec une citation de FrederiCk Pohl (il n'y a guère que les Pdf qui font cette erreur), mais aussi sur le plan de l'esprit puisque les auteurs nous affirment (sans rire) qu'ils sont les premiers à s'être rendus compte que la SF est un genre multi-média et qu'ils vont donc nous proposer le premier ouvrage qui aborde la SF dans sa globalité. Ce petit liminaire est utile parce qu'il permet bien de percevoir la tonalité globale du livre, un mélange de didactisme parfois pédant et d'approximations.

Planète à gogos (Denoel 1971).jpg

Pêle-mêle, quelques (je n'ai pas tout relevé) points sur cet ouvrage :

1) Pas cher ?
Un commercial bénévole des éditions Mnémos en a fait la réclame dans pas mal d'endroits du net en mettant en avant son prix attractif. 24 euros pour un TP, c'est déjà un niveau de prix non négligeable (le HC de CSICSERY-RONAY est dans les mêmes eaux), surtout pour un livre qui s'abîme assez facilement (le mien est déjà rayé). Mais en fait, ce qui m'a fortement défrisé est le fait que ce livre reprenne de très larges pans du précédent opus du couple Colson & Ruaud, La SF, une littérature du réel (voir http://groups.google.fr/group/fr.rec.arts.sf/msg/c0021b1d...).
Cette reprise concerne essentiellement la 3ème partie (la SF du XXème siècle) et est faite quasiment mot à mot, recopiant d'ailleurs telles quelles les erreurs (le couplet sur le Ace D-118, voir http://groups.google.fr/group/fr.rec.arts.sf/msg/a136debf...) ou coquilles que j'ai déjà relevées (le fameux Gordon VON Gelder ou le magazine Starling). On a évidemment le droit de réutiliser ses propres travaux, mais la simple honnêteté voudrait que l'on en informe l'acheteur, chose qui n'apparaît nulle part, ni sur le livre ni dans le buzz autour de lui.
Du coup et pour s'amuser, on pourrait rajouter aux 24 Euros une partie du prix de l'ouvrage qui est incluse dedans puisque l'on a déjà payé pour ce texte, celà nous mène dans les 30 Euros, tarif nettement moins réaliste.

Science-Fiction une littérature du réel.jpg

 

2) Ça parle de quoi ?
Le thème du livre étant la Science-Fiction (c'est en tout cas ce qui est écrit dessus), je trouve que l'équilibre même du livre est bancal.
En effet, il se divise (en terme de quantité de texte) en trois tiers : un tiers de contextualisation (historico-géographico-socio-économique), un tiers consacré à la proto-SF (avant l'invention du terme) et un tiers à la SF (après l'invention du terme).

Le premier tiers est largement superflu et devient même pénible à lire. Même s'il est souhaitable de placer la SF dans son environnement sociétal, les auteurs en font trop, avec (c'est juste un exemple) des pages entières consacrées à la politique du gouvernement japonais en matière de recherche où l'on peut même trouver le pourcentage du territoire japonais raccordé à l'ADSL en 2006 & 1995 (86% et 15% pour les curieux). On croirait parfois lire des articles entiers de wikipedia à chaque début de chapitre. C'est sûrement très bien pour la culture générale du lecteur (bien que ce soit très grossier quand même, on ne résume pas 5 siècles d'histoire en 50 pages), mais la proportion est trop importante pour un ouvrage sur le genre.

Le deuxième tiers se consacre à la proto-SF et lui offre la moitié de la pagination (on arrive en 1914 à la page 144) suivant le canevas habituel : More-blabla-Kepler-blabla-Mercier-blabla-Shelley-blabla-Wells-blabla-Verne. Il y a à un moment une justification assez savoureuse pour l'inclusion de tant de textes que personne n'a lu et ne lira jamais (je cite de tête) : "c'est quand même une masse de 500 ouvrages sur 30 ans", chiffre à rapporter aux 2000 livres de SF/F littéraire parus par an chez les seuls anglo-saxons. C'est vraiment super la proto-SF, mais c'est justement pas de la SF (d'où son nom) et c'est surtout sans aucun intérêt sur une telle longueur consacrée à des oeuvres inaccessibles (et certainement illisibles en l'état).

Ces deux tiers phagocytent malheureusement donc le troisième tiers (la SF après la 1ère GM en gros), pourtant celui qui est le plus pertinent pour l'étude et la perception du genre.

 

3) La SF se réduit-elle aux Moutons ?
On peut légitimement se poser cette question. En effet, ce livre fourmille littéralement de références à des ouvrages de cet éditeur. A la louche, une note sur deux (sur la SF) fait référence à un livre des Moutons (divers numéros de Fiction, le RAH, l'Anderson et le PKD), ce qui, indépendamment de la qualité de ces ouvrages, est loin de refléter la réalité de la réflexion sur la SF. Ce problème d'auto-promotion (pour ceux qui ne le savent pas, les moutons sont justement une firme dirigée par les deux co-auteurs, merci rmd) était déjà présent dans le précédent ouvrage mais il atteint ici des proportions inouïes.

Orphée aux étoiles.jpg

Cela nous vaut des sauts chronologiques surprenants : Fournaise la novella de Kelly (2005, éditée par les moutons) est placée dans la période 1977-1982 sans doute pour pouvoir être citée. Cela amène aussi à des inclusions insistantes : Coney (un auteur mouton aussi) réussit à être cité à deux endroits dans le texte (dont une fois d'une façon fort peu logique) avec en prime la mention de son livre chez l'éditeur (une soi-disant intégrale qui ne l'est bien sûr pas). J'ai même fini par comprendre pourquoi on parlait tant de zombies dans ce livre, alors que c'est un concept qui n'est pas vraiment central en SF : SURPRISE ! il sort un ouvrage sur ce thème en 2009 chez les moutons et dont un des auteurs est Colson. Que l'on souhaite développer son entreprise est normal mais un tel manque de subtilité est un peu méprisant pour le client.

 

4) Du brouillard ?
L'impression générale de cet ouvrage est celle d'un flou permanent, avec des idées peu claires (par exemple, le concept de SF comme littérature de la civilisation qui fonde le livre est abandonné à mi-parcours) et des affirmations toujours sujettes à caution dans leur formulation ou leurs éléments soi-disant factuels.
Pour essayer d'expliquer ce que j'entends par là, je vais prendre un exemple, avec cet extrait (page 225) :

A en croire Stan Barets, "Cordwainer Smith est l'auteur favori de tous les vrais amateurs de SF, le nom que se transmettent en secret tous les vrais aficionados". C'était peut-être vrai lorsqu'il écrivait ces lignes (173, Le science-fictionnaire, Denoël, 1994), mais depuis sont parues une intégrale américaine chez NESFA, une première intégrale française chez Pocket puis une autre chez Folio-SF, et l'on peut donc raisonnablement supposer que Smith n'est plus un tel secret...

On relèvera donc :
- citation de Barets = première erreur (^_^).
- erreur de Barets qui néglige (il écrit cela en 1994), l'édition LDP (1980), l'édition Pocket (1987) et surtout la parution (partielle) chez France Loisirs. Un écrivain secret paru chez France Loisirs, c'est un concept puissant.
- Colson/Ruaud citent l'édition Pocket et semblent la penser comme postérieure à Barets, ce qui est faux (1987 pour l'EO non argentée, je le répète).
- l'intégrale NESFA (tirage limité, organisation de fans) date de 1993 (pour le recueil des nouvelles). Elle est donc elle ausi antérieure à la citation de Barets. Mais c'est typiquement un produit qui ne sort jamais du cercle des aficionados, on ne peut donc se baser sur elle pour soutenir l'idée d'un retour à la popularité de Smith.
- par contre Colson/Ruaud oublient (la connaissent-ils) à la fois la disponibilité, certes partielle mais attestée, de Smith en VO pendant des années (Ace, Del Rey, Sphere...) et surtout la publication de Smith par Baen cette année qui va toucher un public infiniment plus large que celui de NESFA.

The instrumentality of mankind (Del Rey 1979).jpg

Ce petit paragraphe est donc le mélange d'une citation inexacte à la base (donc non vérifiée par les repreneurs) et d'oublis ou d'erreurs d'analyse supplémentaires propres au couple Colson/Ruaud. Du n'importe quoi présenté comme du solide. C'est justement ce sentiment que j'ai eu pendant une grande partie de la lecture.

Le rêveur aux étoiles (FL).jpg

5) Et les goodies de Hervé ?
Éprouvant toujours un plaisir vicieux à traquer les erreurs dans les ouvrages de référence, je dois avouer qu'il y a de quoi se régaler ici.
Voici donc une courte sélection :
- De la petite coquille, style "mini-mock" (la voiture de la série Le prisonnier) et autres.
- De la grosse coquille qui montre que les titres ne sont pas compris : Erewohn qui du coup n'est plus l'inverse de Nowhere (bétîse de ma part), ou le titre du roman de Merrill qui passe de Shadows on the hearth (et les associations voulues avec la sphère domestique) à Shadows on the earth.
- Une chronologie à la PKD : R C Wilson est placé dans la période 1947-1957, l'histoire du futur de RAH est datée 1950-1963
- Des affirmations idiotes : Blue thunder (le film et la série TV mettant en scène l'hélicoptère homonyme, en VF Tonnerre de feu) traitant des extraterrestres, Doctor who jamais diffusé en France (diffusé en 1989 sur TF1 et passant en ce moment sur France 4 et ce depuis quelques années), Zenna Henderson comme, je cite, "une des toutes premières plumes féminines", merci pour les centaines de femmes qui ont écrit de la SF avant elle, une jolie confusion (avec coquille en plus) entre deux livres d'Or en note de page 224 (entre celui d'Orbit et celui propre à Knight que les auteurs ont l'air de croire identiques).
- Des défis lancés aux lecteurs que les auteurs sont sûrs de perdre (celui-ci est déjà présent dans l'ouvrage précédent) : "Examinez n'importe quel numéro récent de Analog pour vérifier que la novella est un format courant". Je l'ai fait : sur 2008 (10 numéros et plus de 60 textes), il y a en tout et pour tout 4 novellas. Vous avez donc moins d'une chance sur deux de tomber sur ce fameux "format courant". Encore une bien belle affirmation, bien autoritaire qui, à l'examen des faits, se révèle être une pure invention.

Analog 2008-12.jpg

On va encore m'accuser de m'acharner sur un ouvrage en VF, mais cette tentative d'une histoire de la SF s'enlise rapidement, en particulier dans l'histoire tout court et la préhistoire du genre. Pas assez rigoureux, mal construit, trop bavard, cet ouvrage marque toutefois un progrès par rapport à son prédécesseur du même duo, en particulier par ses apports sur la SF japonaise.

A ce prix, il vaut quand même attendre de trouver un SP d'occase.

Note GHOR : 1 étoile

11/12/2008

_Where no man has gone before : Women and science fiction_

Where no man has gone before : Women and science fiction: Lucie ARMITT (éditirice) : Routledge : 1991 : ISBN 0-415-04448-0 : 234 pages (y compris index + bibliographie) : une dizaine d'euros en occase pour un TP.

Where no man has gone before.jpg

Ce livre est un recueil de 13 essais (inédits lors de la parution du livres, puis parfois repris pour certains, IIRC) explorant les rapports entre la SF (ou la fantasy) et les femmes, à la fois quand elles sont actrices (auteures), sources de réflexion ou sujets (personnages).

Il est divisé en trois grandes parties :

- Quatre essais sur des auteures traitées individuellement, à savoir Haldane (pour Man's world), Burdekin (pour son étonnante dystopie nazie écrite en 1931 : Swastika night), C. L. Moore, Le Guin & Lessing (les deux dernières étant des passages obligées pour ce type d'ouvrage à orientation féministe).

- Cinq essais sur l'image de la femme dans la SF, tant écrite que cinématographique (deux essais dont un sur Starman et Blade runner qui est assez féroce dans sa critique plutôt pertinente d'un film culte qui peut se lire comme éminemment patriarcal).

- Quatre essais qui analysent le genre et/ou ses lecteurs (juveniles, fantasy Arthurienne...).

Swastika night (L&W 1985).jpg

 
Les diverses contributrices (100% féminines) sont les "usual suspects" de ce type d'exercice (l'essai) pratiqué dans ce contexte idéologique (une approche féministe) : Tuttle, Lefanu, Jones, Saxton.

Que dire de cet ouvrage ?

Tout d'abord, il s'inscrit dans une lignée importante d'ouvrages du même type, visant (pour les pires) à annexer la SF comme auxilliaire d'un féminisme militant ou à la dénoncer comme outil d'oppression à la solde du patriarcat ou (pour les meilleurs) à montrer que le genre SF est/a été un espace d'expression pertinent pour faire avancer les choses ou pour mener une réflexion sur les rapports entre les sexes.

Ce livre emprunte une voie médiane, en ce sens qu'il ne peut s'empêcher de reprendre pour partie des arguments et un vocabulaire devenus caricaturaux (les éternelles théories sur homme=soleil=bien, femme=lune=mal) ou de sombrer dans les lieux communs sur la SF. Clichés dont la partielle fausseté (les fameuses femmes écrivains forcées de prendre des pseudos féminins pour cacher leur sexe) a été démontrée dans des ouvrages sérieux. Pour rester bien dans la ligne, nous avons droit aux traditionnels et inévitables couplets laudatifs sur Le Guin, Russ ou Bradley (qui joue parfois dans les deux camps) et aux railleries non moins obligées sur les 'traîtresses à la cause" comme McCaffrey.

Une fois ces tics (surtout agaçants par leur prévisibilité) mis de côté, cet ouvrage offre malgré tout un certain nombre de discussions solides :
l'étude de Gamble sur C. L. Moore et les symboliques sexuelles est bien faite et convaincante;  le décryptage des stéréotypes féminins dans Blade runner ou dans Rite of passageest exécuté avec calme et précision, ce qui rend la démonstration assez percutante; le texte de Jones sur les juvéniles est intéressant et la démonstration par Moody de la logique de l'usage d'un cadre "Arthurien" pour des textes à visées féministes est parfaitement claire.

Rite de passage (OPTA 1973).jpg

Dans ce cadre, le texte final de Saxton est une note dissonante et une faute de goût, puisque l'ouvrage se termine par une diatribe de cet auteure qui dit en gros que l'on a mis ses textes dans la SF à tort (la fameuse "défense Atwood" avant l'heure) et que maintenant elle a décidé de se libérer de ce carcan et de quitter ce genre de médiocres. Elle va donc se mettre enfin à écrire la littérature (avec un grand L) qu'elle veut (mais sous un pseudo, comme quoi les réalités du marché s'imposent même aux idéalistes). Cette position courageuse et intègre honore sûrement son auteure mais ressemble fort à un crachat final dans une soupe (généralement) défendue par ses collègues et pourrait être perçue comme un manque de respect pour le cochon (machiste ou autre) de payant.

En conclusion, il s'agit d'un livre qui présente de bons passages, mais reste handicapé par son hétérogénéité marquée (normale pour un recueil d'essais de différentes mains) et un certain manque d'originalité (pour qui pratique ce genre d'ouvrage).

Note GHOR : entre 1 et 2 étoiles suivant la familiarité du lecteur avec le discours féministe sur la SF

10/12/2008

_The seven beauties of science fiction_

The seven beauties of science fiction  : Istvan CSICSERY-RONAY Jr. : Wesleyan University Press : 2008 : ISBN-13 978-0-8195-6889-2 : 323 pages (y compris bibliographies, index et notes) : une grosse vingtaine d'Euros en neuf pour un HC avec jaquette.

The seven beauties of science fiction.jpg

 
Ce livre est du à la plume d'un des spécialistes reconnus dans le domaine de l'analyse du genre. Son objectif est, en quelque sorte, de lister les effets ou techniques caractéristiques ou spécifiques de la SF. Ces "effets", au nombre de sept, sont pour l'auteur les élements essentiels des récits SF en ce sens que leur présence est à la fois la marque d'appartenance d'un texte au genre mais aussi que leur existence même est la raison de l'attrait que peut exercer la SF.

Comme sont titre l'indique, il est divisé en sept chapitres principaux correspondant à une des "merveilles" du genre :

- "Fictive neology" : c'est l'étude de toute la partie néologistique de la SF, proche des théories habituelles sur les protocoles de lecture propres au genre.

- "Fictive novums" : traite du concept de novum (cf. Suvin et autres) et de sa place centrale dans le corpus.

- "Future history" : déroule la thématique de la projection dans le futur et de son ancrage dans le présent.

- "Imaginary science" : sur les relations (troubles) entre la SF et la science, les deux se répondant souvent et la seconde étant la caution de la première.

- "Science Fiction sublime" : se penche sur un des effets spécifiques générés par les (bons) textes de SF, le sublime. En gros, c'est le sense-of-wonder ou le conceptual breakthrough.

- "Science Fiction grotesque" : reconnait le fait que la SF essaie certes de générer une impression de sublime mais vise aussi parfois à obtenir un sentiment de monstruosité, particulièrement dans fusions d'éléments différents (homme-machine, esprit-matière...).

- "The Technologiade" : étudie l'intégration par la SF de structures narratives comme celles du roman d'aventure ou de la romance dans un cadre technoscientifique.

Le livre se termine par un courte conclusion soulignant la convergence de chacune des sept beautés de la SF vers le concept de singularité.

Suivent plusieurs pages de notes et une bibliographie primaire et secondaire, cette dernière étant fort riche (une quinzaine de pages) et pertinente (que du lourd).

 

L'approche de la SF par le biais non pas de sa définition formelle mais des ses résultats (les effets produits via les techniques employées) est non seulement très intéressante mais aussi novatrice.

Cela donne un ouvrage dense, avec des parties théoriques assez pointues qui nécessitent une certaine familiarité avec les concepts developpés pour analyser et rendre compte du genre (novum, sense of wonder, future history...). L'usage du jargon de la théorie littéraire et d'un vaste corpus de référence implique d'ailleurs (AMHA) une lecture plutôt fractionnée sous peine de mal au crâne.

Pour une poétique de la SF.jpg

L'auteur emprunte beaucoup à d'autres acteurs de la réflexion sur la SF, notamment aux marxistes comme Suvin ou Jameson, mais réussit une oeuvre personnelle qui mêle rigueur technique et affection affichée pour le genre.

Conformément à l'usage actuel, les exemples sont issus de la plupart des modes d'expression de la SF (cinéma, textes, TV et BD). On pourra juste regretter le choix (assumé et expliqué) de l'auteur de se restreindre aux oeuvres "canoniques", ce qui nous vaut la n-ième discussion autour de Le Guin, Dune (encore !) ou Blade runner.

Planet of exile (Ace Double G-597 1966).jpg


Un ouvrage érudit et roboratif, qui fait preuve d'une approche originale. Une acquisition de choix pour toute bibliothèque consacrée à la partie théorique du genre.

Note GHOR : 3 étoiles