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13/05/2009

_American science fiction and the cold war_

American science fiction and the cold war : David SEED : Fitzroy Dearborn : 2001 (réimpression, première publication en 2000) : ISBN-10 1-57958-195-1 : 216 pages (y compris index et bibliographie secondaire) : 35 USD pour un HC.

American science fiction and the cold war.jpg

Ce livre est dû à la plume de David SEED, un des piliers de la réflexion sur la SF en Grande-Bretagne où il dirige la série d'ouvrages sur la SF publiés par les presses universitaires de Liverpool. Il entreprend ici de nous donner un panorama des peurs générées dans l'immédiate après-guerre par la menace de l'apocalypse atomique et l'ambiance anxiogène de la guerre froide, ce panorama s'appuyant logiquement sur la SF de l'époque, le genre le plus à même de les matérialiser. Outre la SF littéraire, Seed s'intéresse aussi au cinéma dont certaines oeuvres fortes participent de cette thématique.

Ce n'est pas pour cette année (Satellite 1962).jpg

L'ouvrage est organisé en une grosse douzaine de chapitres qui s'appuient généralement sur une oeuvre phare (Dr Strangelove, Limbo, Riddley Walker) ou un auteur précis (Heinlein, Anderson, Pohl & Kornbluth) pour traiter les aspects de la représentation de la guerre froide dans le genre. Ces aspects sont multiples puisqu'ils vont de la description du conflit atomique lui-même aux moyens à mettre en oeuvre pour l'éviter (le débat sur l'IDS) en passant par le triomphe du capitalisme (The space merchants), l'ordinateur tyrannique (Colossus), le récit survivaliste ou post-apocalyptique et la possibilité d'une dictature s'installant aux USA (qu'elle soit d'origine militaire ou non).

Limbo (LDP 1978).jpg

Voici un essai qui dépasse largement le cadre de la simple énumération du traitement de la guerre nucléaire dans la SF (comme le livre de Brains) mais qui est en fait une analyse très fine et largement documentée de la réaction de la SF au climat ambiant des années 50 où divers dangers (pas seulement extérieurs mais aussi internes ou technologiques) menaçaient les USA. Seed nous permet de placer la SF dans un contexte sociétal plus large dont l'influence sur des textes majeurs du genre n'est pas à négliger.

The fall of Colossus (Berkley 1975).jpg

Ecrit dans un style agréable et fort lisible, faisant preuve d'une connaissance étendue du genre et de la société de l'époque, cet ouvrage se lit presque comme un chapitre consacré à une période et un lieu d'une vaste histoire du genre. Sa réflexion plus poussée sur certains auteurs est aussi de grande qualité et parfois inédite, comme le chapitre sur Poul Anderson qui pose d'une façon claire certaines problématiques apocalyptiques souvent abordées par l'auteur dans les débuts de sa carrière. Le fait que son premier texte (Tomorrow's children) soit un récit de guerre atomique est d'ailleurs assez significatif.

Astounding 1947-03.jpg

Un livre plus ambitieux qu'il n'y paraît, un ouvrage au regard acéré sur une période particulière de la SF américaine qui mérite une place de choix dans la bibliothèque de toute personne s'intéressant à l'histoire du genre.

 

Note GHOR : 3 étoiles

07/05/2009

_The alternate history : Refiguring historical time_

The alternate history : Refiguring historical time : Karen HELLEKSON : Kent State University Press : 2001 : ISBN-10 0-87338-683-3 : 130 pages (y compris index et bibliographie) : 14 USD (à peu près 10 Euros) pour un TP disponible chez l'éditeur (http://upress.kent.edu/books/Hellekson.htm).

The alternate history.jpg

Cet ouvrage s'intéresse au genre qui en VF s'appelle l'Uchronie et qui, en VO, est connu sous plusieurs dénominations (Alternate history, Alternative history, Uchronias, Counterfactuals, Allohistories, Parahistories). Une foule de noms différents pour un principe relativement (sic) simple : Et si l'histoire s'était déroulée différemment ?

Hellekson a choisi d'examiner ce sous-genre traditionnellement rattaché à la SF en le comparant avec les principaux modèles historiques (eschatologique, génétique, entropique et téléologique). Pour ce faire, elle organise son court essai (à peine une centaine de pages de texte) en sept chapitres (+ une introduction et une conclusion). Hormis un premier chapitre qui présente les diverses théories historiques et un autre qui traite des univers parallèles (un sujet qui est relié de manière quasi-naturelle à l'uchronie), l'auteur utilise une oeuvre 'principale' pour "ancrer" chacun de ses chapitres. Sont donc tour à tous abordés en profondeur : Bring the jubilee (Moore), The man in the high castle (Dick), The difference engine (Gisbon & Sterling), The Malacia tapestry (Aldiss) et le cycle de la Time Patrol (Anderson) dans son ensemble.

The difference engine (Gollancz 1991).jpg

En bonus on a droit à une bibliographie (primaire et secondaire) permettant d'accéder assez facilement aux textes (éditeur, date et lieu de parution) et un index détaillé par thème.

The man in the high castle (Penguin 1965).jpg

Il faut considérer cet ouvrage plus comme une sorte d'introduction à l'uchronie que l'ouvrage théorique définitif (qui reste à écrire) ou une bibliographie complète sur le sujet (l'auteur renvoie justement à des sites internet pour ce type d'approche). La comparaison entre les textes de fiction et les théories historiques qui les sous-tendent est en tout cas très intéressante, originale et suffisamment claire pour des néophytes dans ce domaine.

Même si une partie des oeuvres analysées en profondeur l'ont déjà été (le Dick et le Moore), il s'agit pour les autres d'un des premiers traitements un tant soit peu étoffé, avec en particulier un qualification de la série d'Anderson comme "Anti-uchronie" qui ne manque pas de sens.

Time patrolman (Tor 1983).jpg

Au chapitre des regrets, outre une bibliographie assez mal fichue qui mélange fiction primaire et analyses secondaires sans possibilité de les différencier (comme chez Henriet, une mode dans le domaine ?), c'est peut-être le manque d'ambition qui prédomine. On sent clairement que l'auteur en "a sous le pied" tant au niveau théorique que science-fictif et on se prend à regretter la taille modeste de l'ouvrage et à rêver à un pavé de 500 pages qui concilierait réflexion théorique et panorama plus général (Hellekson se limite à la SF écrite).

Note GHOR : 2 étoiles

05/05/2009

_Aliens : The anthropology of science fiction_

Aliens : The anthropology of science fiction : George E. SLUSSER & Eric S. RABKIN (éditeurs) : Southern Illinois University Press (série Alternatives) : 1987 : ISBN-10 0-8093-1375-8 : 243 pages (y compris index) : une vingtaine d'Euros pour un HC avec jaquette.

Aliens The anthropology of SF.jpg

Sous une des couvertures les plus laides que l'on ait jamais vues, cet ouvrage est (encore) le recueil des minutes de la J. Llyod Eaton Conférence. Il s'agissait là de la 8ème édition de ce rassemblement d'universitaires, édition qui a eu lieu en 1986.

Les 17 essais qui composent ce volume tournent autour du concept de l'Alien. L'ouvrage est divisé en trois parties :

- "Searchings : The quest for the alien" qui traite du problème général de la représentation de l'alien et en fait une typologie.

- "Sightings : The alien among us" étudie les cas où les aliens sont parmi nous, que cela soit de véritables ETs, des supermen ou qu'ils soient simplement issus d'autres cultures.

- "Soundings ! Man as the alien" est la suite logique de la partie précédente et nous montre l'homme comme l'inconnu, le seul alien qui existe peut-être véritablement.

Les auteurs des essais se divisent encore une fois en les trois catégories usuelles, les auteurs de fiction (ici Niven, Benford, Greenland), les habitués (les deux éditeurs, McConnell) et les "intérimaires". La participation francophone est confiée à Pascal Ducommun (de la Maison d'Ailleurs).

Enemy mine (Tor Double 6).jpg

Avec un sujet aussi vaste que l'Alien (qui est quand même une des figures centrales du genre), et si l'on étend comme ici le concept à l'aliénation sociétale, on aboutit forcément à un traitement plutôt impressionniste du thème.

Cet ouvrage part donc un peu dans tous les sens avec toutefois (c'est suffisamment rare pour être noté) une certaine discipline des intervenants qui basent à peu près tous (sauf McConnell) leur réflexion sur des oeuvres appartenant clairement à la SF. On papillonne donc entre les vrais aliens de Clement ou de Rosny et les aliens plus "culturels" de Neuromancer.

Starlight (Del Rey 1978).jpg

Malgré tout, l'étendue du thème choisi et la multiplicité des approches possibles de l'altérité font que certains essais induisent une sorte d'effet "catalogue" (les sortes d'aliens, la liste des aliens chez Wells, les images du dragon dans la SF US, la typologie des monstres au cinéma...) qui rend la lecture un peu répétitive.

Au final peu de scories (seules certaines tentatives humoristiques tombent à plat en ce qui me concerne) et un moment intéressant à passer pour un ouvrage qui aurait plutôt tendance à ouvrir l'appétit plutôt qu'à rassasier l'amateur.

Note GHOR : 2 étoiles

04/05/2009

_Mindscapes : The geographies of imagined worlds_

Mindscapes : The geographies of imagined worlds : George E. SLUSSER & Eric S. RABKIN (éditeurs) : Souther Illinois UNiversity Press (série Alternatives) : 1989 : ISBN-10 0-8093-1454-1 : 302 pages (y compris index) : une vingtaine d'Euros pour un HC avec jaquette.

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Ce volume fait partie de la série des minutes de la J. Llyod Eaton Conférence, un rassemblement thématique d'universitaires autour de la SF et de la Fantasy qui a lieu aux USA tous les ans. Sont recueillis ici 18 essais (+ 4 addenda) parmi ceux qui ont été présentés lors de la 9ème conférence (en 1987). Le thème était cette année-là les paysages mentaux, chose que l'on peut comprendre de multiples façons, que ce soit comme la cartographie de l'imaginaire au sens strict ou comme la simple géographie fictive.

Les textes présentés sont d'une longueur assez hétérogème (de huit à trente pages) et sont signés des trois catégories d'intervenants habituelles : les auteurs de SF (ici Anderson, Brin et Benford), les spécialistes du genre (Westfahl, Hassler) et les autres universitaires. On notera même la présence française parmi eux de Pascal J. Thomas.

D'une façon encore plus aigüe que d'habitude, il serait vain de chercher un fil conducteur à cet ouvrage (le préface est d'ailleurs assez elliptique sur ce sujet). Cela va d'un recensement des stations spatiales dans le genre (Westfahl qui recycle une étude qui lui a été commandée par la NASA) à une analyse de l'immortalité dans l'oeuvre de Card (Collings) en passant par une réflexion sur les contes pour enfants (Lee) et une lecture serrée de L'île de béton (Lutz).

Espoir-du-cerf (Denoel 1996).jpg

Paradoxalement, c'est un peu ce côté touffu qui fait une partie de l'intérêt de cet ouvrage. Bien sûr il y a les habituels textes dûs à des extérieurs au genre qui enfourchent leurs dadas favoris que ce soient la poésie italienne (en VO) ou Shakespeare (McConnell). Il y a aussi les tentatives alambiquées et vouées à l'échec comme celle de Slusser. Ce dernier tente une analyse de certains livres de SF d'après leur couverture. Outre la curieuse idée de traiter d'un tel sujet sans fournir aucune illustration, le fait qu'il s'agisse de couvertures de Powers, illustrateur célèbre pour ses dessins sans aucun rapport avec le texte (qu'il ne lisait même pas) ou de la même période (voir ci-dessous un des livres évoqués par Slusser) montre le côté futile de la chose.

Driftglass (Signet 1971).jpg

Malgré ces quelques loupés, les textes sont pour la plupart assez intéressants. La variété des approches (L'hypothèse Gaia en SF, les cités futures, l'utilisation des neurosciences dans le genre...) et la qualité des intervenants rendent donc au final l'ouvrage plus agréable à lire que les autres de la même série, et ca malgré l'absence d'unité thématique.

 Note GHOR : 2 étoiles

02/04/2009

_Partners in wonder_

Partners in wonder : Women and the birth of science fiction 1926-1965 : Eric Leif DAVIN : Lexington Books : 2006 : ISBN 0-7391-1267-8 : 429 pages (y compris plus d'une centaine de pages d'appendices biographiques et bibliographiques) : une bonne trentaine d'Euros pour un TP qui ne m'apparaît pas comme éminement solide.

Partners in wonder.jpg

Qui n'a pas lu au détour d'un texte sur la SF les phrases suivantes : "Les femmes n'écrivent pas de SF", "Les premiers auteurs féminins étaient forcées de prendre des pseudonymes masculins" ou "La SF est un genre misogyne et raciste". On trouve de telles affirmations tant sous la plume d'ignares que de connaisseurs, ce qui tend à conférer à cette idée le statut d'une vérité absolue. Malgré ce consensus, il s'est toujours élevé des voix pour contester cette vision, y compris chez des auteurs féminins comme Connie Willis dans un fameux guest-éditorial de 1992.

IASFM 1992-10.jpg

Eric Leif Davin a donc courageusement décidé de voir ce qu'il en était réellement. Pour ce faire, il s'est plongé dans les seules sources pertinentes pour une recherche historique de ce type, les documents d'époque, ici les magazines et autres fanzines des années 20 à 60. Il a donc décortiqué cette masse d'information pour en rétirer des informations véritablement factuelles.

Son ouvrage est organisé en trois parties chronologiques : 1926-1949 (la période où il n'est censé y avoir aucune femme au sein de la SF), 1950-1960 (la première vague féministe) et 1961-1965 (la deuxième vague féministe révisonniste). Suivent deux annexes particulièrement appréciables : une bibliographie des tous les textes d'auteurs féminins sur la période 1926-1965 présentées en une douzaine de tables (par date, par genre, par magazine) et les courtes (mais parfois les seules existantes) biographies de 133 d'auteurs féminins évoqués.

Ce livre est un exercice salutaire et il faut remercier Davin de ses efforts (la somme de travail est impressionnante) et d'avoir réussi à le publier. En effet, il s'agit d'une complète remise à plat de l'histoire des rapports entre la SF et les femmes (qu'elles soient auteurs, éditrices, lectrices) qui bouscule tous les clichés initialement crées pour des raisons idéologiques par les féministes de la deuxième vague, pressées de se débarasser de leurs encombrantes aînées en les rayant de la carte du genre. Le but étant de conférer ainsi un statut d'opprimées et de courageuses pionnières à un groupe d'auteurs qui enfonça (soit-disant) les portes de cette citadelle masculiniste qu'était la SF.

Pique-nique au paradis (OPTA 1973).jpg

Par exemple et parmi de nombreux autres, on lira avec intérêt l'histoire de Leigh Brackett, présentée par Pohl ou Lefanu comme ayant délibérément choisi un prénom non sexué pour dissumuler le fait qu'elle était une femme alors que 1) Leigh est son véritable prénom et 2) que Campbell dès Juillet 1940 annonçait en toutes lettres dans le plus important magazine du genre (Astounding) que "The 'Leigh' in Leigh Brackett is feminine". Chaque affirmation de ce type est soigneusement démontée par Davin qui trace la source initiale (postérieure) du cliché et qui montre quel était la véritable situation à l'époque.

Alpha Centauri or die ! (Ace Double F-187).jpg

Bien évidemment, il n'est pas question pour Davin de nier d'une quelconque façon la place inférieure laissée aux femmes dans la société américaine (et britannique), ni de minimiser les combats menés pour tendre à plus d'égalité. Son discours a pour but de rectifier un faux-procés fait au genre en montrant que, dans les limitations de l'époque, il était plutôt accueillant pour des aspirations créatrices féminines. Les 203 auteurs femmes recensés par Davin qui ont publié sous leur propre nom plus d'un millier de textes sont là pour attester de ce fait.

Un très bon ouvrage à la méthodologie difficile à prendre en défaut. Un regard neuf et argumenté sur un pan de l'histoire du genre, objet de multiples fantasmes mais qui n'avait jamais été aussi finement disséqué.

Note GHOR : 3 étoiles