27/09/2019
_J. G. Ballard_
J. G. Ballard : D. Harlan WILSON : 2017 : University of Illinois Press (série "Modern masters of science fiction") : ISBN-13 978-0-252-08295-5 (la fiche ISFDB du titre) : x+197 pages (y compris bibliographie et index) : coûte 22.00 USD pour un tp non illustré, disponible chez l'éditeur (là), existe aussi en hc (04143-3) et en ebook (05003-9).
Un des paradoxes des ouvrages sur le genre est que, généralement, plus l'auteur étudié est loin du centre de celui-ci, plus la littérature à son sujet est abondante (Vonnegut et Atwood sont les exemples qui viennent immédiatement à l'esprit). J. G. Ballard, l'objet de cette monographie parue dans la série d'études mono-auteurs éditées par les UIP, est dans ce cas là puisqu'il existe pas loin d'une vingtaine de livres qui lui sont consacrés. Sous la plume de D. Harlan Wilson, un universitaire et professeur d'anglais britannique qui est aussi écrivain, ce livre est donc le plus récent sur le sujet.
Après une assez longue introduction, cet ouvrage est divisé en six chapitres de longueur variable. Il commence par une partie biographique d'une quinzaine de pages. Elle est suivie par un chapitre sur les nouvelles et les textes de non fiction de Ballard, puis par quatre chapitres analysant chacun un groupe de textes (les catastrophes naturelles, les catastrophes culturelles, les autobiographies et les derniers romans). Une rapide conclusion précède une copieuse (plus de dix pages) bibliographie (primaire et secondaire) ainsi qu'un index.
Comme je l'ai déjà dit à propos de la monographie de William Gibson parue dans la même série (là), la désignation de Ballard comme l'un des "Modern masters of Science Fiction" me pose problème. Le fait que cet avis ne soit pas juste une vue de mon esprit est rendu encore plus flagrant par les contorsions auxquelles se livre Wilson pour trouver les liens de la majorité des écrits de Ballard (en gros tout hormis ses nouvelles, Hello America et les quatre premières catastrophes) avec la science fiction.
Comme il n'y arrive pas vraiment (il n'y a qu'à voir à quelle vitesse il expédie les quatre derniers romans de l'auteur de Cocaine Nights à Kingdom Come), l'intérêt de l'ouvrage est plutôt faible pour l'amateur pur et dur de SF que je suis. Bien sûr, cela n'enlève rien au travail de Wilson qui est solide et documenté, même si on discerne en filigrane certaines querelles entre Ballardiens zélés de diverses obédiences. Je suis juste amené à regretter que cette série d'ouvrages se disperse un peu vers des auteurs qui sont peut-être plus importants pour d'autres domaines (le postmodernisme pour Ballard, le féminisme pour Russ) que pour la SF elle-même. C'est dommage parce qu'elle a aussi publié des ouvrages sur des auteurs nettement plus centraux pour le genre mais négligés (on pensera à ceux sur Benford, Brunner ou Bester). Il reste tant d'auteurs de SF "pure" à étudier sur ce format.
Note GHOR : 1 étoile (pour le rapport avec la SF)
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23/09/2019
_The Transhuman Antihero_
The Transhuman Antihero : Paradoxical Protagonists of Speculative Fiction from Mary Shelley to Richard Morgan : Michael GRANTHAM : 2015 : McFarland : v+189 pages (y compris index et bibliographie) : ISBN-13 978-0-7864-9405-7 (la fiche ISFDB du titre) : coûte 29.95 USD pour un tp non illustré qui existe aussi en ebook (978-1-4766-1955-2), disponible chez l'éditeur.
Cet ouvrage est dû à un universitaire australien inconnu (en tout cas qui n'a visiblement pas écrit autre chose dans le genre) et semble correspondre à la publication de sa thèse de doctorat. Il s'agit de l'exploration du thème de l'antihéros sous l'angle du post/transhumanisme, aux bémols près que l'antihéros de l'auteur est parfois tout simplement le héros pour le commun des mortels et que le post/transhumanisme évoqué est parfois seulement le résultat d'un entraînement physique poussé.
L'origine de l'ouvrage explique sans doute le sentiment un peu bizarre que j'ai eu à la lecture. En effet, comme souvent avec ce type d'exercice (la thèse de doctorat), l'échantillon des textes étudiés est plutôt limité. Ici Grantham ne considère en profondeur qu'une dizaine de romans (Frankenstein, Odd John, The Stars My Destination, More Than Human, Neuromancer, la trilogie "Kovacs" et Black Man de Mogan) et deux bandes dessinées (V for Vendetta et Watchmen) même si une dizaine d'autres titres Cyberpunks font parfois un brève apparition. Cette sélection réduite et non dénuée d'effets de mode (Gibson, Moore) donne un ensemble qui paraît assez réducteur et plutôt déconnecté de la richesse du genre. La consultation de l'index qui tient en seule page est d'ailleurs assez révélatrice de cette pauvreté.
On trouve aussi dans ce livre une structure en mille-feuille assez typique qui permet à l'auteur de montrer au jury qu'il a bien fait ses devoirs. On a donc souvent une sorte de sandwich avec une petite tranche de théorie (que cela soit sur Nietzsche, le monomythe de Campbell, le mouvement cyborg ou l'esthétique punk) puis une grosse tranche de SF et ainsi de suite au fil des sept chapitres. Il ne faudrait pas conclure de cette description que l'ensemble est mauvais. De fait, si l'on saute les passages extra-SF, le reste est d'une lecture agréable et soulève des points pertinents (même s'ils ne sont pas d'une originalité folle). On appréciera particulièrement les deux derniers chapitres sur certains romans de Richard Morgan qui sont à la fois originaux et intéressants.
Note GHOR : 2 étoiles
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12/09/2019
_Robert Silverberg's Many Trapdoors_
Robert Silverberg's Many Trapdoors : Charles L. ELKINS & Martin Harry GREENBERG (editors) : 1992 : Greenwood Press (série "Contributions to the study of Science Fiction" #53) : x+156 pages (y compris index et bibliographie) : ISBN-10 0-313-26308-6 (la fiche ISFDB du titre) : coûtait une cinquantaine d'USD pour un HC non illustré sans jaquette (ou est-elle seulement absente sur mon exemplaire venant d'une bibliothèque), parfois trouvable.
Le fait que Robert Silverberg soit l'un des auteurs majeurs du genre est indiscutable. Ce qui le rend sans doute encore plus intéressant aux yeux du monde universitaire est sans doute son parcours chaotique et ponctué de périodes de retrait (annoncées avec force publicité) qui l'a mené des bas-fonds de l'écriture à la chaîne à des oeuvres infiniment plus complexes et à un statut de faiseur de best-sellers. Tout cela fait de la bonne matière pour écrire une belle et éducative histoire. Pourtant, et malgré un nombre significatif d'articles, il est un fait qu'il n'existe que peu d'ouvrages qui lui sont consacrés (un Starmont), un livre par Chapman chez Greenwood et, étonnamment, un copieux ouvrage en allemand). Ce titre est donc plutôt une rareté de par son thème et semble avoir eu une histoire éditoriale assez compliquée (c'est du moins ce que laisse entendre la préface).
Cet ouvrage est donc un recueil de sept essais (généralement inédits) assez longs autour de Silverberg ou de ses oeuvres. Après une longue introduction de Clareson, on trouve successivement un survol de la carrière de l'auteur (Letson), un texte sur Dying Inside (Chapman), une étude sur les nouvelles "à chute" (Francavilla), un essai sur l'identité dans divers textes (Flodstrom), The World Inside comme utopie ambiguë (Dietz), le thème de la transcendance chez RS (Reilly) et une analyse de Tom O'Bedlam (Manlove). On termine par une bibliographie primaire et secondaire d'une dizaine de pages et un index.
Si l'on considère l'étendue de la carrière de Silverberg et ses multiples phases, il est évident que le texte "général" de Letson sur l'auteur aurait pu sans problème voir sa taille multipliée par dix tellement il y a à dire. Du coup, une partie des essais ayant choisi une approche "pointilliste" et focalisée, on ne ressent pas trop l'absence d'une mise en perspective plus vaste. Le tout est de bonne tenue même si certains intervenants sont parfois plus dans leur propre "truc" que dans celui de l'auteur. L'attention portée à certains textes "mineurs" (Dietz & Manlove) est de plus rafraîchissante par son originalité. On peut même percevoir cette l'ambiguité et ces non-dits qui caractérise la relation de l'auteur avec la science-fiction.
De toute façon, les rapports complexes (à la Malzberg) et les apports de Silverberg au genre ne pourraient sans doute être sérieusement étudiés que sur un format beaucoup plus important (on pensera à ce qu'a fait Patterson sur RAH ou Porges sur ERB). Il faudra donc nous contenter de ces petites touches pour l'instant avec cet agréable petit (il y a à peine une centaine de pages de texte) recueil qui peut permettre de commencer à cerner un auteur mutliple.
Note GHOR : 2 étoiles
19:24 | 19:24 | Etudes mono-auteur | Etudes mono-auteur | Lien permanent | Lien permanent | Commentaires (0) | Commentaires (0) | Tags : anglais, silverberg, 2 étoiles | Tags : anglais, silverberg, 2 étoiles
10/09/2019
_Strange Horizons _
Strange Horizons : The Spectrum of Science Fiction : Sam MOSKOWITZ : 1976 : Charles Scribner's Sons : v+298 pages (y compris index) : ISBN-10 0-684-14774-2 (la fiche ISFDB du titre) : coûtait 8.95 USD pour un HC non illustré avec jaquette (absente sur mon exemplaire venant d'une bibliothèque).
Il est difficile d'ignorer le nom de Sam Moskowitz quand on s'intéresse aux ouvrages sur le genre. Historien amateur et infatigable des premiers pas du genre, il a, comme beaucoup d'autres pionniers, revêtu de multiples casquettes : rédacteur en chef, anthologiste, essayiste, auteur... Cet ouvrage est un recueil de onze essais thématiques (de quinze à plus de trente pages) initialement parus dans divers magazines (Amazing, WoT) au milieu des années 60, à l'exception de l'un d'entre eux qui semble inédit. Ces essais ont été plus ou moins retravaillés par l'auteur pour cette publication en volume (une comparaison rapide ne montre qu'une légère actualisation).
Après une brève introduction, sont abordés par Moskowitz les thèmes suivants tels qu'ils ont été traités par la SF disponible aux USA à l'époque : la religion, l'antisémitisme, les noirs, le règne des femmes, S. Fowler Wright, la psychiatrie, le policier, la série Tom Swift, la guerre future (qui est le texte inédit du recueil), Charles Fort et Virgil Finlay. Comme c'est prévisible avec Moskowitz, tous ces sujets sont plutôt abordés sous l'angle historique et anecdotique. Un index clôture un volume qui ne comporte pas de bibliographie (sans surprise puisque l'auteur se fie beaucoup à sa mémoire).
Bien évidemment ce livre tombe dans les écueils habituels des écrits de Moskowitz à savoir tout d'abord un certain manque de fiabilité. En effet, aucune des nombreuses affirmations de l'auteur n'est sourcée et celui-ci semble plus se fier à sa mémoire qu'à des témoignages vérifiables. Même si l'ensemble semble offrir une mine de renseignements sur les débuts de la SF, il est nécessaire de faire le tri parmi les informations fournies et de prendre tout ce qui est écrit dans ce livre avec un certain recul. Le deuxième point gênant est la fâcheuse habitude de Moskowitz de jouer au jeu des influences. Pour chaque texte évoqué, il nous propose plusieurs autres supposés l'avoir influencé. Comme tout cela est fait sur la base de vagues similitudes d'intrigue ou de localisation et indépendamment de tout élément factuel, cela n'offre au final guère d'intérêt.
Par contre, il faut louer l'audace de Moskowitz qui aborde dans certains de ces essais (parus dans des magazines importants de l'époque, je le rappelle) des sujets qui fâchent. Lire sous sa plume en 1965 que la SF est parfois fascinée par des charlatans, raciste, antisémite ou misogyne est la preuve que, contrairement à ce que l'on veut maintenant nous faire croire, certains amateurs du genre étaient conscients de ses travers et les dénonçaient vigoureusement. Comme souvent, les esprits soi-disant éclairés désirant une SF bien propre sur elle (grâce à leurs efforts, sans doute) et qui voudraient par opposition nous peindre un genre adhérant auparavant à tous les préjugés possibles, ceux-là feraient mieux de se pencher sur son histoire avant de lancer leur chasse aux sorcières. On se trouve donc au final avec un livre assez courageux dans ses positions mais quand même assez léger dans ses affirmations. Une curiosité et un témoignage historique des premières réflexions sur le genre
Note GHOR : 2 étoiles
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11/08/2019
_The Poetics of Science Fiction_
The Poetics of Science Fiction : Peter STOCKWELL : 2000 : Longman (série "Textual Explorations") : ISBN-10 0-582-36993-2 (la fiche ISFDB du titre) : xi+250 pages (y compris index et bibliographie) : prix original inconnu (sans doute une bonne dizaine de GBP) pour un tp non illustré semble aussi exister en HC (-36994-0) et qui a été réédité par Routledge.
Dans le vaste univers des ouvrages de référence sur le genre, on tombe parfois sur des titres qui apportent une bonne dose de fraîcheur (même pour un livre qui a maintenant presque vingt ans). Que cela soient les livres de Milner (Locating Science Fiction), Brigg (The Span of Mainstrean and Science Fiction) ou Rieder (Science Fiction and the Mass Cultural Genre System), c'est toujours un plaisir de se confronter à des nouvelles approches souvent basées sur des disciplines "extra-littéraires". Ici, Peter Stockwell (un universitaire britannique) utilise essentiellement la linguistique pour embrasser, définir et délimiter le genre (sachant que Poetics dans le titre est à prendre au sens de "the theory of literary forms and literary discourse").
Mélange d'ouvrage théorique et de cahier de devoirs puisqu'il y a un certain nombre d'exercices à faire à l'issue de chacune des neuf parties, cet ouvrage présente une structure homogène (les chapitres suivent exactement le même canevas) mais déroule un discours global assez décousu même s'il est toujours pointu en introduisant un certain nombre de notions spécifiquement développées par l'auteur ou usitées seulement dans des cercles restreints (la Deixis du deuxième chapitre par exemple).
J'ai trouvé l'ensemble souvent brillant (comme le chapitre 4 sur la définition du Pulpstyle), parfois obscur (par manque de connaissances en théorie littéraire), parfois sans objet pour moi (j'ai passé l'âge de faire des exercices), parfois foutraque mais en tout cas toujours intéressant et surtout stimulant. C'est un de ces ouvrages avec qui l'on a vraiment envie de "discuter" (même si c'est impossible). En tout cas, ce livre se lit d'une traite (même si les chapitres sont thématiquement disjoints et peuvent générer des discussions séparées) et mérite d'être essayé avant d'être approuvé.
Note GHOR : 3 étoiles (original mais peut faire mal à la tête)
18:17 | 18:17 | Ouvrages généraux sur la SF | Ouvrages généraux sur la SF | Lien permanent | Lien permanent | Commentaires (0) | Commentaires (0) | Tags : anglais, 3 étoiles | Tags : anglais, 3 étoiles